Imaginez un gouvernement dont vous seriez le héros. Votre objectif d'assainir les finances publiques pour éliminer le déficit serait jugé légitime, pour autant que tout se fasse dans le respect des plus démunis, avec le souci constant d'éviter les injustices et les iniquités sociales.

Mais si vous promettez de maintenir l'expertise dans les services publics et de donner envie aux jeunes de venir y travailler, tout en imposant une réduction des salaires et des effectifs de la fonction publique de 2%, vous serez taxé de fourbe.

Mais si vous affirmez vouloir mettre fin à la dépendance contractuelle donnée à l'externe et diminuer la quantité de contrats, de consultants et d'occasionnels dans les ministères et organismes, tout en imposant une réduction des salaires et des effectifs de la fonction publique, vous serez taxé de fabulateur.

Mais si vous promettez la transparence dans vos actions, dans votre utilisation des fonds publics et de l'intégrité de votre administration publique, tout en nommant à la tête du plus grand donneur de contrats informatiques de votre gouvernement le frère du vice-président d'une multinationale québécoise d'informatique, puis une ancienne cadre dont la firme a contribué au plus grave naufrage informatique du Québec, vous serez taxé de tricheur, d'escroc ou d'amateur.

Mais si la construction d'un mégahôpital est évaluée à 1,7 milliard en 2013 et que, un an plus tard, vous affirmez que les coûts seront plutôt de 3,2 milliards, vous serez taxé d'incompétent, si ce n'est de fraudeur.

Mais si vous martelez que les services à la population ne seront pas touchés par vos compressions, alors que vous venez d'abolir les directions régionales de plusieurs ministères, de sabrer le financement des cégeps et des universités, de mettre la hache dans diverses instances importantes en région, vous serez taxé de mythomane.

Mais si vous mettez sur pied une Commission de révision permanente des programmes dont les coûts avoisinent les 4 millions et que vous vous empressez de tabletter son rapport dès sa sortie, vous serez taxé d'incohérent.

Mais si, d'une main, au nom de l'austérité, vous diminuez le salaire des employés de l'État et que, de l'autre, vous octroyez de faramineuses primes ou de généreuses hausses de salaire aux mandarins du gouvernement, vous serez taxé de trompeur.

Mais si, d'un côté de la bouche, vous dites que les libérations syndicales coûteront 10 millions de plus par an à l'État, en raison des négociations qui s'amorcent dans le secteur public, et que, de l'autre côté de la bouche, vous consentez à votre négociateur en chef un salaire de 450 000$ en vertu d'un contrat de gré à gré, donc illégal, vous serez taxé de malhonnête.

Fort heureusement, il ne s'agit que de fiction! Néanmoins, voici un sage conseil inspiré de Machiavel pour un gouvernement dont vous seriez le héros: «si tu reconnais de loin les maux qui apparaissent, ils guériront vite; mais faute de les avoir reconnus, si tu les laisses croître au point qu'ils éclatent aux yeux de tous, il n'est plus de remède possible».

Meilleurs voeux de santé, de bonheur, de paix... et d'austérité!