Bien que je ne sois pas totalement en accord avec tout ce qui est proposé dans le projet de loi 10 du ministre Barrette, il est clair qu'une réévaluation des structures administratives est nécessaire. Dans n'importe quelle organisation, trop de paliers compliquent la prise de décisions.

Il demeure que c'est une réforme majeure et complexe pour faire économiser «seulement» 220 millions sur les 32 milliards dépensés annuellement par le gouvernement québécois. Alors, quoi faire de plus pour contrôler l'augmentation des coûts tout en maintenant les services dans un système qui fera de plus en plus face à un vieillissement de la population et une pénurie de personnel? Malheureusement, peu de personnes ou de groupes en discutent ouvertement, mais la meilleure solution est d'uniformiser notre système de santé.

Incompatibilité chronique

Historiquement, des décisions ont été prises de manière décentralisée dans les nombreuses agences, établissements et groupe d'achats au sein du réseau de la santé. Il en ressort que dans une même région, il est impossible de trouver deux hôpitaux qui sont totalement compatibles entre eux.

Ainsi, même si nous sommes en 2014, chaque fois qu'un usager est transféré d'un hôpital à un autre, ou ouvre un dossier dans un nouvel établissement ou GMF, presque tout doit être recommencé à zéro.

La réforme Barrette propose une trentaine de structures administratives qui, d'ici 5 ou 10 ans, se seront enfin auto-uniformisées. Il y aura toutefois encore dans le réseau de la santé au moins façons de faire, 30 façons de penser, 30 listes de médicaments et, pour chacun des grands secteurs hospitaliers, 30 comités. En sommes, 30 superstructures différentes, encore plus puissantes et plus difficiles à faire changer qu'aujourd'hui.

Nous continuerons donc d'avoir encore différents dossiers de santé et différentes cartes d'hôpital alors que nous avons déjà la carte soleil, qui devrait normalement nous relier partout. Nous appelons le système de santé un réseau, alors qu'il n'en est pas un au sens du partage de l'information et de l'efficacité.

Le privé en exemple

Le gouvernement et le MSSS devraient prendre exemple sur les grandes entreprises privées qui ont harmonisé et centralisé plusieurs décisions et activités pour devenir plus efficaces et productives. Uniformiser les colonnes vertébrales du réseau de la santé que sont les procédures, les comités, les listes de médicaments et de fournitures ainsi que les logiciels permettrait de faciliter l'échange d'information, rendrait la formation et la mobilité de la main-d'oeuvre plus simple et libérerait beaucoup de temps administratif qui pourrait être réinvesti en soins directs aux usagers.

Un véritable dossier en temps réel

Un jour ou l'autre, le gouvernement devra cependant se rendre compte qu'il doit arrêter de mettre de l'argent dans le Dossier Santé Québec actuel (DSQ), qui n'est qu'une base de données incomplète, donc peu fonctionnelle cliniquement. Un vrai DSQ doit être LE dossier en temps réel du patient, sans que nous ayons besoin d'en avoir d'autres en parallèle dans les hôpitaux, GMF et cliniques privées. En plus d'une augmentation considérable de l'efficacité du réseau, ceci permettrait de réduire les erreurs médicales et les examens non nécessaires.

En excluant le service de la dette, la santé prend actuellement près de la moitié du budget du Québec. Avec le vieillissement de la population, cette proportion ne fera qu'augmenter. Plus nous mettrons de l'argent en santé, moins nous en aurons pour l'éducation ou le développement économique, et plus difficile sera le contrôle du déficit et de la dette. Couper dans l'éducation nous priverait du meilleur moyen de prévention et d'enrichissement collectif à court, moyen et long terme.

Soyons donc ouverts aux changements et ne faisons pas qu'une manucure administrative au monstre qu'est devenu le système de santé. Même si ça prend dix ans, repensons-le, rendons-le plus efficace et uniformisons-le dans son ensemble, une fois pour toutes!