Des représentants municipaux parlent du projet de loi 3 comme d'un «coffre à outils». Le seul outil s'y trouvant s'avère être un marteau, pour frapper les travailleurs. On trompe le public lorsqu'on réfère à la négociation. Le maire Lévesque, de Trois-Rivières, nous le rappelait d'ailleurs. Le ministre Poëti, responsable de la région de Montréal, implorait récemment les parties à négocier. On n'a pas besoin de la loi 3 pour cela!

Bien avant la crise financière globale de 2008, qui a fait gonfler ces déficits, les mouvements syndicaux canadiens et québécois avançaient une solution à mettre de l'avant tant pour le Régime de pensions du Canada (RPC) que de notre Régime des rentes du Québec (RRQ), qui aurait eu pour conséquence de possiblement doubler graduellement les rentes pour tous et pour toutes. Rien de «corporatiste» là-dedans.

Leurs régimes sont complémentaires au RRQ. Selon les normes de l'OCDE, le système de retraite public canadien est robuste, mais il est l'un des plus modestes de tous ces pays membres, puisqu'il verse moins d'argent.

Nous avons entendu bien des gens nous dire ici que c'était rêver, sans jamais expliquer pourquoi ce rêve était inatteignable. Certains gouvernements provinciaux, de concert avec le gouvernement fédéral, nous disaient que «ce n'est pas le temps». Pourquoi et quand est-ce que ça le serait? Nous n'avons jamais de réponse. Dans le débat entourant le projet de loi 3, nous n'avons de cesse d'entendre les lamentations de nos politiciens à propos du manque de couverture et de protection à la retraite pour la majorité de la population. Ce projet de loi ne fait rien pour cette majorité.

Par contre, l'amélioration du RRQ offre le double bénéfice de l'équité entre les jeunes et ceux qui le sont moins et entre ceux qui possèdent un régime complémentaire et ceux qui en sont dépourvus. Une pierre, deux coups. Quatre millions de cotisants et leur famille au Québec amélioreraient leur situation. Les régimes complémentaires des villes sont coordonnés au RRQ, la pression et les obligations financières des villes en seraient ainsi grandement réduites.

L'exemple d'ailleurs

Le gouvernement albertain, qui nage dans le trèfle et n'a certainement pas de problème structurel d'équilibre budgétaire, a tenté cette année de modifier substantiellement son régime provincial de retraite fourni aux employés par les municipalités. Le LAPP - le régime de retraite des autorités municipales: villes, cités et commissions scolaires - aurait été beaucoup moins généreux pour ses bénéficiaires. On a annoncé dernièrement l'abandon de cette triste idée qui ne trouvait aucune justification financière sérieuse, si ce n'est qu'elle était idéologiquement et politiquement motivée.

L'Ontario a vu ses finances publiques se détériorer grandement au cours des cinq dernières années. La dette a gonflé de 96 milliards et s'établira à 298 milliards en mars prochain. Ce ne sont là pas d'excellentes nouvelles pour les finances publiques de cette province. Que fait et que fera celle-ci au sujet des retraites dans le secteur municipal et pour tous ses citoyens?

La chef du Parti libéral, Kathleen Wynne, a mis sa tête en jeu en déposant au nom de son gouvernement minoritaire un budget déficitaire et dans lequel elle s'engageait à créer un régime public ontarien de retraite universel, en supplément du régime fédéral, puisque celui-ci n'agissait pas. Ce plan représente une variante possible du plan avancé par le mouvement syndical. On entend que peu parler ici de ces développements.

Le ministre Moreau, il est vrai, s'est peinturé dans un coin, et ne voudra pas donner l'impression d'indécision qu'avait laissée l'administration précédente. Le gouvernement albertain n'a certainement pas perdu la face pour autant en faisant marche arrière à propos de la réforme de son LAPP. Le mouvement ouvrier a le droit de se mobiliser et le fera. Il est encore temps de revoir tout cela.