Depuis la défaite cuisante qu'a subie le Parti québécois lors de l'élection du 7 avril dernier, les ténors souverainistes ont recommencé à dire sur toutes les tribunes que le mouvement indépendantiste devait se remettre à faire la pédagogie de la souveraineté. Ils affirment que si leur objectif de faire du Québec un pays n'est toujours pas réalisé, c'est parce que les citoyens n'ont pas compris les tenants et les aboutissants de leur projet.

De mon point de vue de pédagogue, ce genre d'affirmation me laisse plutôt perplexe. Il m'apparaît en effet étonnant qu'un enjeu politique qui est au coeur du débat public depuis une cinquantaine d'années nécessite encore de longues explications.

Cette lecture que font les souverainistes des raisons de leur échec est d'autant plus étonnante que le mouvement indépendantiste québécois a compté dans ses rangs certains des meilleurs pédagogues politiques de l'histoire contemporaine du Québec. De Pierre Bourgault à Lucien Bouchard en passant évidemment par René Lévesque, les souverainistes ont pu profiter d'hommes et de femmes de grand talent pour expliquer aux Québécois les raisons qui, selon eux, justifiaient l'accession du Québec au statut d'État souverain. S'il faut en croire l'analyse des leaders souverainistes actuels, leurs prédécesseurs ont lamentablement échoué.

Si le désintéressement des Québécois pour l'option souverainiste ne peut être attribué au manque de talents et de conviction de ceux qui l'ont défendue depuis un demi-siècle, c'est donc du côté des «apprenants», pour utiliser le jargon du ministère de l'Éducation, qu'il faut regarder pour expliquer l'échec des souverainistes.

Sous cet angle, la conclusion qui s'impose, c'est qu'une large majorité des Québécois souffre de troubles graves d'apprentissage! Ce ne serait donc plus de politiciens pédagogues dont le mouvement souverainiste aurait besoin, mais d'orthopoliticiens! Peut-être même faudrait-il, dans la logique de la pédagogie péquiste, administrer une dose massive de Ritalin aux Québécois afin qu'ils comprennent enfin les bienfaits de l'indépendance politique!

Je pense plutôt qu'au même titre que les milliers d'élèves québécois qui passent ces jours-ci leurs examens de fin d'année, et qu'ils vont majoritairement réussir, poursuivre leur cheminement scolaire et relever de nouveaux défis, les Québécois ont entendu les explications des souverainistes, les ont comprises et les ont rejetées. Ils aspirent maintenant à tourner la page et à passer à autre chose.