Dans l'article de Louise Leduc publié le 14 mai («Comment enseigner quand on a du mal à écrire?»), on apprend que de nombreux enseignants sont anxieux vis-à-vis leurs connaissances de la langue de Molière.

Plusieurs redoutent les moments où ils devront écrire au tableau et privilégient les conversations téléphoniques au courriel pour communiquer avec les parents de leurs élèves. Il est dur de ne pas se sentir outré devant cette situation et de craindre pour notre système scolaire. Comment pouvons-nous sauvegarder notre langue si celle-ci n'est pas bien enseignée?

Cependant, il serait faux de croire que la solution réside tout simplement dans une refonte du TECFÉE, cet examen que tous les élèves universitaires doivent passer pour avoir leur diplôme en enseignement. Le problème est, comme la plupart des problèmes en éducation, beaucoup plus complexe. Plutôt que de se demander comment ces élèves ont pu obtenir leur diplôme, il serait mieux de se poser la question suivante: comment pouvons-nous nous rendre à l'université - ce qui signifie passer l'examen ministériel du secondaire 5 ainsi que l'examen uniforme du cégep - avec une aussi piètre connaissance du français?

Apprendre même après les études

La première partie de la réponse se trouve dans les écoles primaires. Avant la réforme scolaire, l'accent était mis sur la grammaire et les élèves devaient apprendre par coeur les règles grammaticales et les nombreuses exceptions de notre langue. Qui ne se rappelle pas de «hibou, chou, genou, caillou, bijou, joujou et pou» ? Malheureusement, cela n'est plus le cas aujourd'hui, du moins, dans la majorité des écoles primaires.

Je remarque, chaque année, dans mes classes de 1re et 2e secondaire, des lacunes aberrantes. Les élèves qui arrivent au secondaire avec un retard ne peuvent généralement pas se rattraper et cette matière devient souvent un poids qu'ils traînent jusqu'à la fin de leur parcours scolaire. Il n'est donc pas étonnant que la majorité des mesures pour contrer le décrochage scolaire visent les élèves du primaire. Cependant, nous arrivons rapidement à un cercle vicieux. Si un grand nombre d'enseignants ne maîtrisent pas la langue, comment peuvent-ils bien la transmettre? La réponse réside dans l'enseignement continu.

Selon moi, la partie la plus inquiétante de l'article de Mme Leduc ne repose pas sur les résultats de l'étude, mais bien sur le manque d'intérêt des répondants à s'améliorer, à corriger le tir. Il s'agit d'un des grands problèmes de notre système d'éducation. Les enseignants n'ont pas à poursuivre leur apprentissage une fois leur diplôme reçu.

Ce n'est pas le cas en Ontario, par exemple, où il y a un ordre des enseignants qui demande à ses membres de poursuivre leur apprentissage tout au long de leur carrière. Et c'est probablement cela qui devrait nous révolter: ce manque de conscience professionnelle chez certains enseignants. Un enseignant qui se rend compte de son manque de connaissances en français devrait tout faire pour s'améliorer, même si cela veut dire suivre des cours. Ça devrait être une condition pour le renouvellement de leur contrat.

Pour qu'une langue vive, elle doit être bien enseignée. Il est impératif que certaines rectifications soient apportées dans notre enseignement du français au primaire ainsi que dans le suivi professionnel.

Il est temps que la gent publique nous démontre un réel souci pour notre système scolaire. Critiquer un examen universitaire ne ferait que soulager les symptômes d'un problème qui dure depuis trop longtemps. Il est temps de s'attaquer à la source de tous ces maux, de nous questionner sur notre mode de fonctionnement. Un ordre des enseignants pourrait-il résoudre ce problème? Nous nous devons au moins un débat sur le sujet.