Si tant est que l'égalité entre hommes et femmes soit une valeur fondamentale de la société, quel besoin avons-nous de légiférer en matière d'égalité de représentation des sexes en politique? Les bonnes idées n'ont, que je sache, de sexe autre que celui que leur impute la grammaire.

Tous les partis politiques se réclamant de ce principe et sachant que les femmes représentent la moitié et plus de l'électorat, il y a fort à parier qu'aucune candidate sérieuse n'a été écartée par quelque parti que ce soit eu égard à son sexe depuis belle lurette. J'en conclus que ce n'est donc pas parce qu'on les en chasse, mais plutôt parce que ça ne les intéresse pas que les femmes soient moins présentes en politique que les hommes.

Notez bien, je ne suis pas a priori contre les moyens coercitifs d'atteindre un idéal; comme tout un chacun, je suis fervent de justice et d'équilibre. Ceci dit, je partage aussi avec une bonne partie de mes semblables une méfiance instinctive envers celles (et ceux) qui veulent se voir confier un pouvoir ou une responsabilité sans indiquer au préalable ce qu'elles (ou ils) ont l'intention d'en faire.

C'est malheureusement le cas de Mmes Delvaux et Navarro. Il faut une loi, plaident-elles, pour assurer la représentation égale des hommes et des femmes en politique. Mais pourquoi, à part le principe? Motus, ou presque.

À moins que...

Si effectivement la société devait garantir aux femmes la moitié des sièges au conseil des ministres de tout gouvernement à venir, j'ai quelques défis en matière d'égalité homme-femme à leur lancer:

- La consécration de l'égalité des sexes au pouvoir une fois acquise, vous engagez-vous à dissoudre le Conseil du statut de la femme ou à créer un Conseil du statut de l'homme?

- Le taux de réussite des garçons au secondaire est présentement inférieur à celui des filles, et l'écart tend à s'accroître avec le temps. Vous engagez-vous à voter des lois imposant l'égalité à ce chapitre et, tant qu'à y être, à légiférer pour qu'il y ait autant d'hommes que de femmes en enseignement?

- En conséquence de ce qui précède, les taux d'admission et de diplomation des femmes au premier cycle universitaire progressent continuellement et dépassent maintenant la moitié, alors que ceux des hommes, évidemment, diminuent d'autant. Êtes-vous en faveur d'une loi qui établirait la parité obligatoire de représentation des sexes dans les facultés contingentées comme la médecine, le droit, l'éducation et le génie?

- En regard des programmes tels que «Chapeau, les filles!», qui visent à promouvoir l'accès des femmes aux métiers traditionnellement masculins, vous engagez-vous à lancer des programmes équivalents pour les hommes dans le genre «Plus de profs en pantalons!» ou «Les vrais costauds sont à l'hosto!» ?

- La misandrie des tribunaux en matière familiale est proverbiale. Vous engagez-vous à légiférer pour instaurer la garde partagée automatique dans les cas de séparations et de divorces et à considérer le revenu potentiel et non le revenu réel dans le calcul des aliments?

Voilà des défis concrets, des problématiques réelles qui touchent quotidiennement mes semblables. D'ailleurs, à voir toutes les avancées féministes des 50 dernières années, s'il y a vraiment des vieux «boys» dans un club plénipotentiaire quelque part, ils ne doivent pas faire grand-chose d'autre que somnoler parmi les effluves de scotch et de cigare.

On se doute bien, mesdames, que vous ne souhaitez pas davantage de poids politique pour remettre en question les acquis décrits ci-haut, mais plutôt pour obtenir plus, pour aller encore plus loin. La question que l'on doit se poser est donc: jusqu'où?