Les ténors souverainistes entonnent un « requiem pour le projet de pays », d'après Le Devoir du 9 avril. On me permettra peut-être, à titre d'indépendantiste depuis bien avant la naissance du Parti québécois, de m'interroger sur le pays qu'on aurait porté en terre lundi dernier, le pays des PKP, Drainville et consorts.

Dans le Québec de Pierre Karl Péladeau, ce messie encensé immodérément par toutes les belles-mères souverainistes, les lock-out sont monnaie courante et il n'y a pas de loi anti-briseurs de grève.

Il n'y a pas de télévision publique : PKP n'a eu de cesse, depuis des années, de dénoncer la « concurrence déloyale » que Radio-Canada ferait à son empire, et de réclamer à grands cris l'arrêt des subventions publiques à cette institution. Pas de Conseil de presse non plus, Québecor s'en est retiré depuis des années, l'accusant de partialité dans ses avis et jugements critiquant ses publications. Pas d'agence de presse coopérative entre divers médias : Québecor s'est retirée de La Presse canadienne pour créer sa propre agence, QMI, seule source où s'abreuvent tous les médias de l'empire PKP.

Il y a, par contre, une chaîne d'information continue idéologiquement campée à l'extrême droite du spectre politique et utilisant les procédés les plus grossiers pour flatter les bas instincts de la populace, à l'image de Fox News aux États-Unis : Sun News, dont on pourra facilement créer un double bien Québécois et francophone.

En « Pékapie », un premier ministre peut, sans soulever le moindre questionnement éthique, contrôler le plus grand empire médiatique du pays, et on se retrouve subitement en « Berlusconie », mais sans le clown qui permet au moins d'en rire, même jaune.

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Dans le Québec de Bernard Drainville fleurit le « crois ou meurs », les hôpitaux doivent mettre à la porte les infirmières, les médecins, les employés d'entretien, voire les bénévoles qui veulent porter le voile, la kippa, le turban, le crâne dénudé des disciples de Krishna.

Dans le Québec du PQ, où la loi des élections à date fixe est bafouée à la première occasion, il n'y a qu'une seule « ligne juste » : celle du Parti. Pas question de faire des compromis avec qui que ce soit, surtout pas avec des indépendantistes qui auraient le défaut inexcusable de voir le pays autrement. La seule candidate à laquelle le PQ n'a pas offert d'opposition dans la dernière élection, c'est la très fédéraliste et très libérale Fatima Houda-Pepin. Pas question de faire la même chose dans les quelques comtés où d'authentiques indépendantistes - qui ont eu l'impardonnable défaut de ne pas soutenir la « ligne juste » - avaient tout de même une bonne chance de bloquer les libéraux avec l'appui du PQ. Le pays n'avait pas besoin d'eux, semble-t-il...

Il y a plus de 50 ans que j'attends un pays, mais je ne veux rien savoir de celui-là.