Un homme en crise est mort sous les balles d'un policier du SPVM. Malheureusement, l'événement n'a plus rien d'étonnant dans le paysage québécois. Ce qui est nouveau, c'est que les policiers ont appelé en renfort un collègue utilisateur de l'arme à impulsion électrique, le fameux Taser, mais que celui-ci n'a pas eu le temps d'arriver sur les lieux avant qu'Antoine Magloire ne soit abattu. Le dénouement de l'intervention aurait-il été différent si les policiers sur place avaient pu utiliser un Taser pour maîtriser M. Magloire?

Tout indique que oui. Il faut d'abord comprendre le déroulement de l'intervention. M. Magloire semblait en crise et n'obéissait pas aux ordres qui lui étaient lancés. Il était aussi en possession d'un marteau qui maintenait les policiers à distance sécuritaire - leur formation leur a appris à agir ainsi.

Pour ajouter à ces éléments déjà explosifs, d'autres techniques pour le maîtriser, notamment le poivre de Cayenne et l'utilisation d'une voiture pour le renverser, n'ont pas eu les effets escomptés. Du point de vue des intervenants aux premières loges - les policiers -, la menace persistait. L'étape suivante ne réjouissait personne, mais s'est produite lorsqu'un policier a perçu un danger de mort. Un homme en est décédé, plusieurs policiers ont été traités pour choc nerveux.

En quoi le Taser aurait-il pu sauver M. Magloire? Il s'agit d'un moyen de maîtriser un individu agressif tout en le maintenant à distance. Une décharge électrique peut-elle être mortelle? Oui, mais dans la plupart des cas, ceux qui la subissent ont des blessures somme toute mineures et temporaires.

J'ai longtemps été hésitant à propos de l'arme à impulsion électrique, craignant comme beaucoup qu'il ne s'agisse que d'une arme de plus à la disposition des policiers. Ma position a toutefois évolué à la lumière des récents décès lors d'interventions policières à Montréal et à Toronto. Le coroner Jean Brochu avait d'ailleurs recommandé d'équiper et de former au Taser un plus grand nombre de policiers à la suite du décès accidentel de Patrick Limoges, en 2011. Je crois maintenant qu'il est nécessaire d'offrir aux policiers un moyen alternatif d'intervenir dans certaines situations explosives. Le Taser m'apparaît comme une solution possible.

La Presse rapportait hier que seulement 150 des quelque 4600 policiers du SPVM sont habilités à utiliser l'arme à impulsion électrique. Ailleurs au Canada et aux États-Unis, des corps de police ont choisi d'équiper la majorité de leurs patrouilleurs d'un tel pistolet. L'initiative aurait évidemment des coûts importants en équipement et en formation pour les corps policiers québécois. Il serait toutefois envisageable de prioriser certains endroits ou certaines fonctions pour alléger l'investissement à court terme, mais le besoin me semble criant.

Si cette voie est choisie, il me semble aussi crucial d'encadrer étroitement l'utilisation de l'arme de façon à ce qu'elle soit réellement utilisée comme moyen de remplacement de l'arme à feu et non comme une nouvelle façon de contraindre les citoyens à obéir. Il faut mettre fin aux morts inutiles.