Bien d'accord, monsieur Pratte, le gouvernement est incohérent. Mais pour nous, contrairement à ce que vous avancez, la cohérence ne consiste pas à étendre au gaz de schiste les opérations d'exploration pour connaître l'ampleur éventuelle des gisements exploitables, mais bien à élargir la portée du projet de moratoire sur le gaz de schiste (car ce n'est toujours qu'un projet...) pour qu'il s'applique aussi au pétrole, et ce sur la totalité du territoire du Québec.

On le sait, la fracturation utilisée pour l'exploration et l'extraction du gaz et du pétrole de schiste pollue les nappes phréatiques, consomme de gigantesques quantités d'eau et dégage dans l'atmosphère d'importants volumes de méthane (un puissant gaz à effet de serre). Dans de telles conditions, l'exploitation de cette ressource serait un crime contre l'environnement.

Le signal d'alarme du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) ne laisse aucune place au scepticisme: la planète subit des bouleversements climatiques qui s'annoncent catastrophiques si rien n'est fait pour réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre générées par l'activité humaine.

Ce n'est pas en se lançant dans une course effrénée pour l'exploitation de nouveaux hydrocarbures que l'on assurera l'indépendance énergétique du Québec, mais en amorçant dès maintenant un virage radical en vue de réduire progressivement notre dépendance vis-à-vis des énergies fossiles. Mais les politiques et les gens d'affaires restent sourds, obnubilés par les retombées économiques de ces nouveaux hydrocarbures non conventionnels, dont l'exploitation s'inscrit dans le court terme et a des allures de bulle financière.

Devant un dossier aussi complexe, il est tentant de chercher des réponses simples (voire simplistes) qui ne remettent pas en question le modèle économique dominant. Mais cela ne ferait que retarder la mise au point de modes de production et de consommation plus sobres, plus efficaces et plus respectueux à la fois de notre écosystème et de notre intérêt à long terme. Bref, cela ne ferait que repousser notre rendez-vous avec la réalité: le réchauffement climatique se poursuit et s'aggrave. Décidément, le gaz et le pétrole de schiste ont tout du cadeau empoisonné.