L'accident de Lac-Mégantic n'est pas sans rappeler les risques inhérents au transport de matières dangereuses telles que le pétrole. Cet événement ne peut mieux illustrer l'importance pour nos gouvernements d'adopter des normes de sécurité entourant le transport de ce type de marchandises. Certains acteurs de notre société croient que la solution au problème du transport du pétrole réside dans la libération de notre dépendance au pétrole. Cet argument ne contribue malheureusement pas à faire avancer le débat public.

Il est vrai que le Québec n'est pas le plus grand consommateur de pétrole. D'après les chiffres du ministère des Ressources naturelles du Québec, le pétrole représente, en 2009, 39,06% de la consommation totale d'énergie, tout juste derrière l'électricité (40,05%). 

Si le Québec peut se vanter d'être plus «vert» que d'autres provinces et pays, c'est en grande partie grâce à notre immense potentiel hydroélectrique. Une grande partie de l'énergie consommée au Québec provient de l'hydroélectricité non pas parce que nos dirigeants ont été si «verts» et intelligents pour développer cette filière énergétique, mais bien parce que nous avons de l'eau en abondance au Québec.

Sur le plan de la consommation énergétique, chaque pays fait des choix en fonction des ressources qu'il a à sa disposition. À l'échelle mondiale, le pétrole représente 32,4% de l'approvisionnement en énergie, suivi par le charbon (27,3%) et le gaz naturel (21,4%), également considérés dangereux et/ou sales par les environnementalistes. En 2010, les énergies renouvelables ne comblent que 13% de l'approvisionnement énergétique mondial, soit une légère augmentation depuis 2005 (12,4%). Alors, est-il vraiment raisonnable de penser aujourd'hui libérer le monde entier de sa dépendance au pétrole? L'avancée de la science permettra sûrement un jour de développer d'autres formes d'énergie moins dangereuses que le pétrole. Mais en attendant, ne vaut-il pas mieux faire le mieux avec ce qu'on a?

Certains commentateurs pensent qu'il ne vaut pas la peine de débattre des modes de transport du pétrole. Pourtant, je crois qu'il y a ici matière à débat. Une étude du Département américain des transports de 2010 met en évidence le fait que certains modes de transport de produits à risque sont beaucoup plus dangereux que d'autres. Pour la période 2005-2009, l'étude met en évidence le fait que le transport par train est trois fois plus dangereux que celui par pipeline. Ces chiffres devraient nourrir notre réflexion lorsque vient le temps de débattre de questions énergétiques. 

Par exemple, les écologistes ne devraient-ils pas plutôt s'atteler à collaborer avec nos élus quand un projet de pipeline est sur la table? Après tout, les municipalités pourraient s'entendre avec nos élus pour ne pas faire passer de pipeline en plein centre-ville, compromis beaucoup moins évident dans le cadre du transport par train.

Nous avons raison de nous préoccuper de la sécurité du transport de marchandises dangereuses comme le pétrole. La tragédie de Lac-Mégantic doit nous faire réfléchir sur nos normes de sécurité des transports, notre dépendance envers les énergies fossiles, ainsi que sur les pistes à suivre pour éviter de pareilles tragédies. 

Cependant, c'est voir la vie en rose que de penser pouvoir sortir du jour au lendemain du pétrole. Dans notre avenir proche, le pétrole est là pour rester, pour le meilleur comme pour le pire. Adaptons-nous et faisons de notre mieux pour en sécuriser l'approvisionnement. La politique est l'art du possible, et non de l'idéal.