À l'émission Les années-lumière du dimanche de Pâques, à la Première Chaîne de Radio-Canada, j'ai écouté le débat animé par Yannick Villedieu entre le biologiste athée Cyrille Barrette et le jésuite Jean-Guy St-Arneault. J'avais l'impression d'assister à un dialogue de sourds.

D'un côté, un incroyant rationaliste qui réduit la connaissance à l'apprentissage ou à l'acquisition de données matériellement vérifiables par une science exacte. De l'autre, un croyant, un prêtre, incapable de démontrer que la connaissance peut découler d'une expérience spirituelle et affective qu'aucune science ne peut vérifier.

Y a-t-il contradiction entre la foi et la connaissance? Cyrille Barrette affirme que sur la base de la raison et de sa manifestation majeure, la science, on ne peut rien savoir au sujet de Dieu. Donc, un croyant qui affirme connaître Dieu commet un abus de langage; il s'illusionne ou tente de se convaincre.

Mais depuis quand la raison se limite-t-elle à la science? Si la raison est la faculté qui permet à l'être humain de penser, de juger et d'agir conformément à des principes qui ne sont pas nécessairement matériels et scientifiques, Dieu est accessible à la raison et peut faire l'objet d'une connaissance qui est de l'ordre spirituel et relationnel.

C'est évident qu'un croyant ne peut savoir avec certitude, parce que la foi n'est qu'une espérance. Doris Lussier disait: «Je ne dis pas: Je sais; je dis: Je crois. Croire n'est pas savoir. Je saurai quand je verrai, comme vous autres. Si j'ai à savoir...Je n'ai qu'une toute petite foi naturelle, fragile, vacillante, bougonneuse et toujours inquiète. Une foi qui ressemble bien plus à une espérance qu'à une certitude». Mais l'espérance n'est-elle pas la foi à son meilleur? Puisqu'elle nous fait croire que demain sera mieux qu'aujourd'hui, selon Charles Péguy.

À la question des miracles, l'animateur Yannick Villedieu a demandé au père St-Arneault s'il croyait que l'on pouvait marcher sur les eaux. Poser la question, c'est ne rien comprendre à l'exégèse et à la théologie biblique. Dans la version de Matthieu, cet épisode de Jésus marchant sur les eaux (Mt 14,14-33) nous dit quelque chose de l'Église naissante. La barque, l'Église, est sur la mer, le lieu des forces du mal. Il y a tempête et les disciples ont peur. Le Christ ressuscité, qui a vaincu les forces du mal, vient vers eux pour les rassurer. Pierre, le chef de l'Église, se risque lui aussi à marcher sur l'eau comme le Seigneur, mais sa foi trop fragile l'en empêche et il s'enfonce dans l'eau. Ce qui signifie que l'Église a toujours besoin du Christ pour sa mission. Elle dépend de lui. Voilà le miracle qui n'a rien d'une pensée magique et qui dit tout sur la foi-espérance des disciples.

Le biologiste Barrette a beau affirmer qu'il n'a ni mépris, ni pitié, ni admiration, ni envie à l'égard des croyants. Son discours dit tout le contraire. Selon lui, croire est irrationnel et Dieu lui-même (ou elle-même) n'est qu'une illusion ou pire une délusion, un délire que l'on prend pour une réalité.

Quant au père St-Arneault, je ne trouvais pas ses arguments très convaincants. J'avais plutôt l'impression que pour lui, la foi demeure un mystère qu'il est inutile de remettre en question.

Personnellement, je suis convaincu que la foi et la science ne s'opposent pas; au contraire, elles se complètent et se relancent sans cesse. La science explique le comment de l'existence; la foi répond au pourquoi.