Au terme de plusieurs mois de stigmatisation sociale et politique, l'industrie québécoise de l'exploration et du développement de nos ressources minérales se retrouve aujourd'hui dans un environnement d'affaires où la transparence, la prévisibilité et la stabilité ne sont toujours pas au rendez-vous.

L'avènement de nouvelles modifications potentielles apportées au régime fiscal minier ne fait que perpétuer l'angoisse et l'appréhension vécues par les entrepreneurs du secteur. Cette hausse de l'incertitude arrive à un mauvais moment alors qu'on assiste à l'émergence d'une crise de capitaux au Québec et au Canada.

Ainsi, après les tournées de financement de 2012 et de l'hiver 2013 sur les marchés financiers, la fin d'un cycle haussier semble se confirmer pour un grand nombre de nos sociétés minières. Au congrès mondial de l'Association canadienne des prospecteurs et entrepreneurs au début du mois, l'industrie a reçu une véritable douche d'eau glacée. Le rapport d'un comité spécial affirme que la moyenne des levées de fonds pour les PME du secteur dépassait à peine 900 000$ à l'automne 2012, une baisse de 58% depuis le début de 2010. Le tiers des sociétés d'exploration et minières juniors, tant au Canada qu'au Québec, afficherait un fonds de roulement de moins de 200 000$, une encaisse à peine suffisante pour se rendre au début des travaux printaniers.

Les grandes sociétés minières canadiennes connaissent également un tournant dans leurs levées de fonds. Le resserrement des marchés financiers les a forcés à consolider leurs activités et à se concentrer sur celles qui leur offrent une meilleure perspective de rendement.

Ce qui distingue ce nouveau cycle baissier des deux derniers vécus par l'industrie, c'est que cette flexion n'est pas le fruit d'une dégradation typique des prix des métaux - ces derniers se maintiennent toujours à des niveaux élevés -, mais bien d'une hausse incomparable des coûts tant d'exploration que de développement.

Alors que les prix des métaux se sont accrus de 34% de 2008 à 2011 et ont subséquemment entamé une correction à la baisse et une stabilisation au début 2013, les coûts de mise en valeur se sont eux accrus avec force. Selon la banque ABN-Amro, cette hausse a atteint 65%, provoquant une solide chute de la rentabilité des entreprises du secteur.

C'est à la fois cette crise des capitaux et la poussée des coûts qui viennent menacer l'envergure et la survie de la filière minérale que le Québec aura mis plus de 50 ans à bâtir et développer.

L'exploration demeure le flux vital qui permet d'appuyer l'essor d'un secteur qui représente aujourd'hui près de 8 milliards$ de contribution au PIB du Québec, qui dépense annuellement 750 millions$, surtout en régions-ressources, qui soutient plus de 52 000 emplois permanents et qui verse annuellement 1 milliard$ aux trésors publics. Sans l'apport d'un investissement continu et concurrentiel, plusieurs sociétés d'exploration et petites sociétés d'exploitation vont rapidement s'éteindre.

À toute cette problématique courante vient s'ajouter le spectre de voir le gouvernement du Québec appliquer une taxe régressive sur la valeur de la production des sociétés minières. L'impact immédiat sur les opérations plus modestes, les projets en cours et les projets en développement sera de réduire la rentabilité des projets à coûts élevés, exactement le type de projets qui prévaut au Québec.

À la veille de déposer un énoncé budgétaire qui devrait contenir des modifications à la Loi sur l'impôt minier et au régime de redevances, le gouvernement du Québec va s'illustrer davantage dans ce contexte, par son courage à faire preuve non pas d'obstination politique, mais de pragmatisme économique, en ne mettant pas en péril la croissance et la vitalité future de plusieurs de nos régions-ressources au sein desquelles l'industrie minière occupe une place structurante.