Inutile de prétendre vous faire un portrait de celui que je connais encore moins que certains autres candidats dont on avait vanté les qualités, mais qui ne me sont pas pour autant familiers. Le cardinal Jorge Mario Bergoglio, âgé de 76 ans, vient d'Argentine, et il est d'origine italienne. Pour l'heure, c'est mon savoir.

Il me semble opportun toutefois de souligner la portée symbolique de son choix. Un précédent presque égal à celui de la renonciation de Benoit XVI. Après un pape qui se retire, un remplaçant qui vient d'Amérique latine. Deux événements dont le caractère inédit ne peut pas rester inaperçu. Faut-il y voir un signe qu'il y a dans l'Église une vitalité qui a échappé aux observateurs les mieux informés? Pour ma part, j'y vois un signe d'espérance. Dans une Église dont on s'était presque habitué à ne plus attendre, voici qu'on nous en sert deux, et de taille, en quelques semaines.

Des amis m'ont taquiné depuis l'annonce de Benoit XVI quand je leur disais que le professeur du cours sur la Trinité comptait encore sur l'Esprit pour la vie actuelle de l'Église. Comme je répondais alors: «L'Esprit est capable de temps supplémentaire.» J'ajouterais aujourd'hui: «Il nous le montre à nouveau. Ouvrons les yeux!»

L'Église, par la voix des cardinaux, vient de signifier qu'elle est vraiment universelle et qu'elle reconnaît les siens en Amérique latine. On sait que c'est le continent qui compte le plus grand nombre de catholiques. En plus d'un geste d'équité, il faut voir dans le choix d'un pape argentin une volonté de prendre en compte la réalité démographique. Espérons que l'Église saura aussi entendre la voix des peuples latino-américains et surtout apprendre à parler un nouveau langage pour tous les peuples de la Terre.

Mais ce choix a aussi des conséquences pour les communautés de l'hémisphère nord. Les Européens et les Nord-Américains sauront-ils accepter ce qui vient du Sud?

Un mot enfin sur l'âge de l'élu. Un âge qui voisine à la fois ceux de Jean XXIII et Benoit XVI. Dans un cas, on a amorcé un grand processus de changements, dans l'autre on a assisté à la continuité. Bien malin qui pourrait deviner en ce moment ce qui arrivera avec le nouveau pape. Je me retrouve donc renvoyé à mon espérance: que l'Esprit qui a inspiré le geste de Benoit XVI et qui a soutenu les cardinaux dans le choix d'un Latino-Américain continue de veiller sur l'Église.

Je termine en soulignant encore une fois que les gestes récents dont nous venons d'être témoins montrent que l'Église n'est pas la propriété d'un pays, d'une race ou d'un continent, mais qu'elle est peuple de Dieu et qu'Il s'occupe encore et toujours des siens, car il est un Dieu fidèle, et ce, malgré nos infidélités.