Le premier congrès de la jeune formation politique Option nationale (ON), tenu la fin de semaine dernière à Montréal, a été l'occasion d'obtenir de pressants éclaircissements quant à la démarche préconisée par les troupes de Jean-Martin Aussant pour permettre au Québec d'accéder à l'indépendance.

En clair, la méthode privilégiée par M. Aussant consiste à tenir un référendum sur la ratification d'une nouvelle Constitution nationale, qui aurait en toute vraisemblance été préalablement rédigée par une Assemblée constituante. Bien qu'attrayante aux premiers abords, cette idée est historiquement inadéquate et politiquement inopérante dans le contexte québécois.

Les exemples d'Assemblée constituante dans l'histoire contemporaine ont tous en commun d'avoir été le produit de consensus national, apparu généralement après qu'ait été consommée la rupture avec le régime précédent. Ce fut d'abord le cas en Belgique en 1830, lorsque le peuple belge, uni dans la Révolution contre les Hollandais, a appelé unanimement à la création d'un  congrès national chargé de rédiger la Constitution du nouvel État indépendant.

On peut observer le même phénomène dans le contexte de la défaite allemande de 1918, où l'adoption d'une nouvelle Constitution par l'Assemblée nationale constituante consacrait la disparition de l'Empire prussien au profit de la nouvelle République de Weimar.

Même la France révolutionnaire n'a pas échappé à cette règle. Souvenons-nous que lors des États généraux de 1789, c'est à l'invitation du roi que les deux ordres privilégiés se sont joints aux membres du tiers-état alors constitués en Assemblée nationale. Le souverain, seul détenteur du pouvoir légitime sous l'ancien régime, consentait ainsi à réformer les institutions politiques de son» État. La Constituante a adopté dès le mois d'août la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, et deux ans plus tard, la Constitution de 1791. Toutes deux ont reçu la sanction royale.

Or, la condition historique sine qua non à la composition d'une Assemblée constituante fonctionnelle et opérante, à savoir la présence d'un consensus autour du projet de pays ou du projet constitutionnel, n'est pas présente dans le contexte actuel. En d'autres termes, la polarisation de l'électorat québécois sur la question nationale rendra l'Assemblée constituante inopérante si la rupture n'est pas préalablement consommée avec l'État canadien.

Ainsi, plutôt que de rassembler les éléments modérés des deux camps autour d'un projet commun, le projet d'Assemblée constituante risque fort d'attiser les antagonismes, au détriment de la qualité  du futur texte constitutionnel.

De plus, l'élection d'une Constituante s'avère être un pari risqué pour le mouvement indépendantiste qui regroupe des souverainistes d'obédiences politiques bien différentes. Les débats fratricides risquent fort de miner l'éventuelle coalition souverainiste, et ce, avant même que le dernier acte prévu à l'agenda « optionniste » ne soit encore joué, à savoir le référendum de ratification de la Constitution ; la pièce de résistance, il va sans dire...

En somme, la voie menant à l'indépendance privilégiée par Jean-Martin Aussant semble parsemée d'embûches. Dans les faits, ce mode d'accession à la souveraineté sera un véritable casse-tête pour les stratèges souverainistes et alourdira inutilement la marche vers l'indépendance.

En s'invitant dans le débat ayant cours sur le mode d'accession à la souveraineté, qui était jusque-là la chasse gardée du Parti québécois, Option nationale (ON) entend incarner l'alternative indépendantiste à la «trop conciliante» gouvernance souverainiste. Toutefois, les incertitudes liées au mode d'accession minent ce qui aurait du être le premier objectif de l'exercice, à savoir celui de rassembler les militants indépendantistes de tous les horizons politiques autour d'un consensus portant sur le thème du pays en devenir et sur la méthode pour y accéder.