À l'approche de Noël et de la fin des classes, des milliers d'élèves, des jeunes et des moins jeunes, se rendent à l'école en apportant un présent à leur enseignant. Afin de ne pas froisser leurs élèves, les professeurs accepteront avec plaisir ces cadeaux. Le devraient-ils?

«Pourquoi pas? me répondait un professeur. Si les parents font un cadeau, c'est qu'ils en ont les moyens et ce n'est sûrement pas une bouteille de vin qui changera mon jugement, je suis professionnel».

C'est justement la réponse que les fonctionnaires convoqués à la commission Charbonneau donnaient. «Un employé professionnel peut accepter un cadeau sans que son jugement soit perturbé», disaient-ils. J'en doute.

Est-ce pareil pour les intervenants du milieu scolaire? La belle carte faite à la main contenant un mot gentil ne pose pas de problème, j'en conviens, mais le crayon Mont-Blanc, la bouteille de vin, le Chanel no. 5 ou les billets de hockey est l'équivalent des grosses enveloppes brunes remises par les entrepreneurs. Cette avalanche de cadeaux met une pression additionnelle sur les familles à faible revenu qui elles aussi doivent gâter l'enseignant pour ne pas marginaliser leurs enfants.

Les parents veulent-ils ainsi acheter les enseignants? Ceux-ci seront-ils plus sévères envers le jeune qui n'aura pas apporté un beau cadeau? Sûrement pas, mais là n'est pas le problème, car en agissant ainsi, les élèves apprennent qu'il est «normal» dans notre société de donner un cadeau à une personne en position d'autorité. Ils trouveront donc «normal» de recevoir des cadeaux le jour où ils seront en position d'autorité.

Je suis persuadé que les jeunes peuvent transmettre leur appréciation envers leur enseignant, le responsable la garderie ou le directeur au moyen de cadeaux faits à la main accompagnés d'un «merci».

Si on désire vraiment changer notre société, il faudrait commencer par la base. Les établissements scolaires devraient mettre en place une politique concernant les cadeaux comme on le fait maintenant au sein de plusieurs grandes entreprises.