À diverses reprises durant la campagne électorale, un récent rapport de SECOR-KPMG a été mentionné dans le débat sur les redevances minières. Publié juste avant le déclenchement des élections, le rapport se voulait un «outil de référence» pour discuter de cette question.

Contrairement à ce que suggèrent les discours électoraux, le Québec est un producteur minier d'importance secondaire sur l'échiquier mondial. Le sol québécois n'est pas des plus riches en ressources minérales et les extraire est coûteux, à cause des distances et de l'hiver. À une exception près, les 15 mines québécoises actuellement en opération sont de taille moyenne ou petite à l'échelle mondiale, avec des coûts d'exploitation plus élevés que la moyenne. Dans le jargon, on dit du Québec qu'il est un producteur d'appoint. L'activité n'y est intense que lorsque les prix des ressources minérales sont élevés, comme ce fut le cas tout récemment.

Mais la baisse récente des prix mondiaux des ressources (25% dans le cas du fer), amenée par le ralentissement chinois, rendra beaucoup plus difficile le financement de nouvelles mines dans les prochaines années, particulièrement celles dont les coûts sont élevés, comme au Québec.

La construction d'une mine de capacité moyenne exige typiquement un investissement de l'ordre de 1 milliard, sinon plus. En général, le financement d'une nouvelle mine est fait sur les marchés de Toronto, New York, Frankfort, Londres et Sidney, auprès d'investisseurs spécialisés (il n'y en a aucun au Québec!). Leur décision de financer ou non une mine repose sur l'évaluation de la capacité du projet minier de rembourser rapidement l'investissement initial. Ils utilisent à cette fin un calcul connu sous le nom de valeur actualisée nette (VAN) et de nombreuses hypothèses quant aux prix mondiaux de la ressource pour la période de vie utile de la mine (15 à 30 ans), ses coûts spécifiques d'exploitation, les taxes et redevances, les surprises politiques et environnementales, etc.

Les redevances minières représentent un coût parmi d'autres pour une minière. La forme des redevances, taxes sur la valeur du minerai extrait ou taxe sur les profits qui en résultent, peut toutefois jouer un rôle important dans les décisions de financement. Pour une mine dont les coûts d'extraction sont bas, une taxe sur la valeur du minerai est la formule la plus simple, et a peu d'impact sur la décision de financer ou non la mine. C'est pourquoi des pays tels que l'Australie et le Brésil l'ont adoptée.

Pour une mine dont les coûts d'extraction sont élevés, et c'est le cas des mines québécoises, une taxe sur les profits a moins d'impact sur les décisions d'investissement et sur la continuité des opérations existantes. C'est le régime qui est en place en Amérique du Nord et dans tous les pays où les coûts sont plus élevés.

Près du tiers des mines actuellement en marche au Québec sont marginales en terme de profitabilité et plusieurs sont maintenus en exploitation surtout parce qu'elles poursuivent en parallèle des travaux prometteurs d'exploration. Elles paient donc peu de redevances. L'introduction d'une taxe sur la valeur de leur minerai aurait le double effet de diminuer leurs réserves exploitables et d'attaquer leur profit, mettant en jeu leur survie.

Le rapport SECOR-KPMG conclut que le régime de redevances le mieux adapté au secteur minier québécois est basé sur les profits, rejoignant ainsi les conclusions de diverses études sur le sujet, dont un rapport très cité de l'ONU. La baisse récente des prix des minéraux ne fait qu'accentuer cette conclusion. Asseoir des cadres financiers de cinq ans sur des hausses importantes de redevances minières au Québec semble risqué dans la situation actuelle.