L'observation minutieuse du monde de la politique avec mes yeux de biologiste m'amène parfois à penser que les campagnes électorales sont aux humains ce que les parades nuptiales sont aux oiseaux.

Pour s'attirer la faveur des femelles, certains mâles du peuple à plumes ont plus d'un tour dans leur duvet. En plus de fabriquer des nids quatre étoiles, ils présentent des chorégraphies, donnent des cadeaux et fredonnent de mélodieuses chansons.

Ici, comme en politique, le succès est indissociable de l'image et les couleurs bleues, blanches, rouges et vertes sont aussi populaires dans les plumages nuptiaux que sur les pancartes électorales. Pendant que le paon déploie sa queue multicolore, le paradisier de la Nouvelle-Guinée s'invente de très belles lunettes bleues et l'oiseau satin décore son nid avec des fourchettes, des couteaux en plastique et autres objets chatoyants d'origine anthropique. Mais que voulez-vous? L'utilisation de Photoshop n'étant pas très populaire dans les colonies de volatiles, on arrange son apparence comme on peut.

En dehors de l'image, les oiseaux se déplacent beaucoup pendant leur campagne nuptiale. Mais ici, au diable les autocars, la carboneutralité et le serrage de mains. L'important, c'est de chanter la pomme à un maximum de partenaires et de gazouiller très fort pour enterrer les refrains du concurrent. Si ce dernier ne veut clouer son bec et céder la place, tous les coups bas sont permis pour le réduire au silence. Chez beaucoup d'espèces, les mâles vont donc consacrer une partie de leur temps de parade à se mettre en valeur et l'autre partie à détruire ce que ses concurrents sont en train de bâtir.

Pour mettre toutes les chances de leur côté, ils n'hésiteront pas à attaquer un rival à coup de griffes et de bec et lui faire perdre charme et crédibilité auprès des femelles. Ils peuvent aussi saisir un moment d'inattention de l'adversaire pour saccager son nid ou lui voler les cadeaux qui devaient lui servir d'appât auprès des individus convoités. Bref, les oiseaux aussi ont compris que la mesquinerie est une stratégie efficace pour se donner de l'avance dans une compétition.

Mais, même si tous les coups sont permis entre mâles pendant les parades nuptiales, il y a un fait qui reste constant d'une année à l'autre. Après l'accouplement, chez la plupart des espèces, les mâles retrouvent leurs couleurs ternes et laissent derrière eux les femelles qui doivent alors pondre et s'occuper des oeufs et des oisillons. Elles ne se feront convoiter qu'à la saison de reproduction suivante avec les mêmes promesses, les mêmes images et les mêmes tromperies.