Ils se sont connus dans le quartier de leur enfance, Ahuntsic, grâce au chien de ma mère que mon père a rattrapé. Ils se sont mariés par amour, à 20 ans, le 8 juin 1942, en plein milieu d'une guerre mondiale; le lendemain des noces, mon père est parti outremer avec l'armée canadienne. Il a survécu.

Ma mère et lui ont traversé sept décennies ensemble, un exploit de nos jours! Ils ont élevé cinq enfants, qui leur ont donné sept petits-enfants et six arrière-petits-enfants; ils ont connu Duplessis et Camilien Houde, les premières vedettes de télévision, la Révolution tranquille, Jean Drapeau, le métro et Expo 67, les Expos, les années Trudeau, Bourassa et Lévesque, les référendums, la commission Gomery et les accommodements raisonnables.

Pendant 70 ans, ils ont marché main dans la main, chacun avec sa spécialité. Ma mère, c'était l'artiste. Elle avait des mains de fée! Elle cuisinait à merveille, elle cousait et réparait tous nos vêtements, elle brodait et tricotait; elle a crocheté de splendides jetés, des châles, des nappes et des napperons, elle a peint de magnifiques tableaux.

Mon père, c'était le sportif. Il a fait de la natation et du plongeon, il a joué au hockey, au baseball semi-professionnel, aux quilles, au golf. C'est aussi un grand fan du Canadien et des belles bagnoles. Comme le dit Lynda Lemay, le plus fort, c'est mon père, le premier homme rose, celui qui a toujours partagé les tâches ménagères avec ma mère... sauf la cuisine! Le seul plat qu'il savait cuisiner, c'étaient les oeufs dans le sirop d'érable, qu'il adorait!

Ils sont restés fidèles et unis pour le meilleur et pour le pire. À eux deux, ils ont surmonté mille et une épreuves, vaincu des maladies et vécu les deuils de nombreux parents et amis, ils ont pleuré et prié côte à côte, mais ils ont aussi pris le temps de rigoler, de s'amuser avec nous, de faire la fête, de se payer des restos et des sorties, de voyager ensemble.

Si leur couple a traversé l'épreuve du temps, c'est qu'ils ont su faire des compromis et mettre beaucoup d'eau dans leur vin. La recette de leur longévité? De grands bols d'amour, de générosité et d'abnégation assaisonnés d'une pincée de folie! Leur secret? Quand les problèmes survenaient, chacun pensait d'abord à l'autre et à nous avant de penser à ses propres intérêts.

Le temps a usé leurs corps mais pas leur coeur; ce sont de vrais phénomènes, parmi les rares qui s'aiment toujours après 70 ans. Qui peut en dire autant? Aujourd'hui, à 92 et 94 ans, ils sont presque à bout de souffle et plutôt dépassés par les cellulaires, les iPad et les grèves étudiantes, mais ils sont encore ensemble et il est certain que, dans leur cas, même la mort ne pourra les séparer!

Félicitations à Aline et Philippe Lanoix pour leur 70e anniversaire de mariage.