Le 23 avril, les électeurs albertains se rendront aux urnes à la suite de ce qui promet d'être une campagne électorale plus palpitante qu'à l'habitude, dans une province où la stabilité politique est la norme.

Depuis plus de 40 ans, le PC (Association progressiste-conservatrice de l'Alberta) domine sans partage la vie politique de la province. Au pouvoir sans interruption depuis 1971, le PC a remplacé un autre parti dynastique, le Crédit social, au pouvoir entre 1935 et 1971.

En mars 2008, lors de la dernière élection provinciale, la présence du peu charismatique Ed Stelmach à la tête du PC n'avait pas empêché son parti de remporter plus de 50% des suffrages et pas moins de 72 des 83 sièges. Avec un taux de participation d'à peine 40%, toutefois, cette élection a été loin de soulever l'enthousiasme, comme si le PC avait été réélu par défaut, en raison de la faiblesse endémique des partis d'opposition traditionnels (NDP et Parti libéral).

Quant au parti Wildrose (dont le nom s'inspire de la rose aciculaire ou églantine, fleur officielle de la province depuis 1930), une formation politique de droite créée officiellement seulement quelques mois avant l'élection de 2008, il n'a remporté que 7% des voix, ne faisant élire qu'un seul député. Le 23 avril, le Wildrose, désormais considéré comme le seul parti d'opposition capable de vaincre le PC, sera-t-il en mesure de mettre fin à son long règne?

La réponse à cette question sera en partie déterminée par la performance des deux femmes qui s'affrontent lors de la présente campagne: la première ministre Alison Redford, du PC, et Danielle Smith, du Wildrose.

Dans cette lutte électorale, Mme Redford apparaît comme une candidate modérée, voire centriste. Cheffe du PC depuis octobre 2011, elle est une avocate qui, avant de se lancer dans l'arène provinciale il y a quatre ans, a notamment travaillé comme conseillère de Joe Clark et, plus tard, comme avocate pour les Nations unies. L'expérience internationale de Mme Redford, qui a travaillé plusieurs années en Afrique du Sud, contraste avec l'aspect beaucoup plus « provincial » de ses prédécesseurs, Ralph Klein et Ed Stelmach, qui n'avaient ni son éducation ni sa connaissance profonde des questions internationales.

Contre Mme Redford se dresse Danielle Smith, dont le parcours est très différent du sien. Ancienne journaliste et, plus tard, directrice de la section albertaine de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante (FCEI), Mme Smith défend une vision hyper-individualiste et antiétatique qui tranche généralement avec l'approche plus modérée de Redford. Pour Smith et son parti, il faut réduire la taille de l'État albertain, en matière de régulation et de finances publiques.

Malgré tout, il n'en reste pas moins que les deux seuls partis qui semblent avoir une chance de l'emporter le 23 avril ont plusieurs choses en commun, à commencer par leur soutien indéfectible envers l'industrie pétrolière et le développement des sables bitumineux. Dans cette perspective, les politiques environnementales ne sont une priorité ni pour le PC ni pour le Wildrose.

Il y a deux ans, le Wildrose dominait clairement dans les sondages, mais plus récemment, des facteurs, comme la meilleure situation économique de la province, ont favorisé une remontée du PC dans les intentions de vote.

La lutte s'annonce donc serrée (surtout à Calgary et dans les circonscriptions rurales) et le Wildrose, qui bénéficie notamment des conseils de Tom Flanagan, proche de Stephen Harper, doit convaincre les Albertains qu'il peut effectivement gouverner une province dominée par le PC depuis plus de 40 ans.