En opposant son veto au projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Syrie, la Chine affirme avoir agi dans l'intérêt du peuple syrien.

C'est ce qu'on peut lire dans un commentaire publié dans le People's Daily, journal du Comité central du Parti communiste, et signé du nom de plume Zhong Sheng. Les caractères qui composent Zhong Sheng signifient «le son d'une cloche», mais sur le plan phonétique, c'est la même chose que «la voix de la Chine». Le jeu de mots n'est pas un hasard: la voix de la Chine, sur ce sujet, est aussi claire que le son d'une cloche.

Le geste de la Chine au Conseil de sécurité a ceci de particulier qu'il n'y avait pas, dans ce cas-ci, d'intérêts nationaux chinois en jeu, du moins, pas de façon directe ou immédiate. Cela constitue une rupture avec la façon dont la Chine a utilisé son droit de veto par le passé. Le hic, avec la position chinoise, c'est que la résolution des Nations unies visait à atteindre le même résultat que les Chinois prétendent rechercher. Dans un contexte où les forces syriennes tuent des civils de façon systématique sous les ordres du président Bachar al-Assad, la résolution avait pour but d'empêcher ce dernier d'utiliser la force pour «résoudre» les problèmes politiques en Syrie.

La Chine affirme vouloir permettre au peuple syrien d'échapper à la violence, aux conflits et aux flammes de la guerre, mais son veto aura plutôt l'effet contraire. Depuis que la Chine a utilisé son droit de veto, nous avons déjà assisté à une escalade de la violence gratuite contre la population civile à Homs.

En utilisant son droit de veto, le gouvernement chinois s'est assuré que les atrocités allaient continuer et augmenter en intensité en Syrie. Contrairement à ce que semblent penser les dirigeants chinois, la réputation de leur pays au Moyen-Orient sera grandement compromise - et leur ambition de faire preuve d'un pouvoir attractif à l'échelle internationale sera déçue.

Si la Chine avait réellement le désir de voir le peuple syrien décider de son avenir politique sans qu'Assad ne soit contraint à se retirer du pouvoir, elle aurait dû exercer des pressions pour que la résolution soit modifiée et qu'on demande un cessez-le-feu et l'enclenchement d'un processus politique en vue d'un règlement et d'un éventuel retrait d'Assad. Est-ce que les États-Unis, la Grande-Bretagne ou la France auraient opposé leur veto à une telle résolution?

Alors, pourquoi la Chine a-t-elle causé une confrontation au Conseil de sécurité? La montée de la Chine, qui arrive à une époque où l'Europe et l'Amérique du Nord se remettent en question et vivent un déclin apparent, a donné le sentiment à ses dirigeants qu'ils n'avaient plus besoin de tolérer l'ordre mondial de l'après-guerre froide.

Lorsqu'une grande puissance en plein essor comme la Chine décide de jouer un rôle actif sur le plan international, c'est, en principe, une bonne nouvelle. Mais le monde ne sera pas meilleur si la nouvelle assurance de la Chine vise - ou semble viser - à aider presque exclusivement des autocrates à demeurer au pouvoir par la répression brutale de leur peuple.

Copyright: Project Syndicate, 2012.

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