Pour diriger une nation, il faut être pragmatique, visionnaire, courageux et indépendant d'esprit.

On peut bien critiquer les positions du nouveau parti de François Legault, c'est de bonne guerre en politique, je suppose. Cependant, dire que le projet de société qu'il porte est «comptable» ne tient pas la route, car cet argument démontre que les adversaires politiques de la CAQ ne savent pas compter, ou pire encore, qu'ils ne s'intéressent pas aux chiffres.

Moi aussi, j'aimerais bien remplacer Jean Charest par un grand-leader-charismatique-rassembleur, mais puisque nous n'en avons pas un sous la main, il faut gérer la nation en attendant LE grand soir, en attendant le Messie, en attendant LE grand projet de société, que personne, soit dit en passant, ne peut décrire.

Mais quel projet de société peut-on s'offrir en 2011? Quel projet de société la France peut-elle s'offrir? L'Espagne? L'Irlande? La Chine? En vertu de quel principe faut-il avoir un projet de société rassembleur qui fait rêver? Est-ce que cela ne serait pas un luxe? Les pays scandinaves en ont un. René Lévesque et le PQ avaient définitivement un projet de société à offrir aux Québécois, mais ces derniers l'ont rejeté, deux fois plutôt qu'une.

Au Québec, le temps est venu de gérer le désastre laissé par les libéraux, par le PQ et par un système politique archaïque qui n'est pas conçu pour l'efficacité à long terme. Un mandat de quatre ans pour nos grands leaders, vous trouvez ça normal? Imaginez quand on n'a pas de leaders, mais seulement des politiciens!

Pour gérer le désastre, nous aurons besoin de gestionnaires chevronnés, courageux, qui sont prêts à prendre des risques (calculés) et qui auront une vision à long terme pour l'intérêt supérieur du Québec.

Le Plan Nord n'est pas un projet de société. Il n'est, dans sa forme actuelle, que la continuité d'un plan d'exploitation des richesses naturelles conçu par un parti politique et confié à une agence de relations publiques pour le rendre socialement acceptable, à défaut d'être durable.

Il ne faut pas confondre vision et projet de société. Un bon gestionnaire a forcément de la vision, c'est même ce qui le définit. Je ne crois pas que le gestionnaire chevronné est l'apanage de la droite. Un gestionnaire honnête et compétent doit nécessairement s'élever au-dessus des clichés, des tendances. Si on ne peut faire confiance à un gestionnaire de droite, pourquoi pourrait-on le faire pour un gestionnaire de gauche?

Est-ce si difficile à envisager que le collectif ne s'oppose pas nécessairement aux droits individuels? Nous n'avons pas à choisir entre les deux, nous devons protéger les deux. C'est pour cette raison que nous avons besoin de gestionnaires qui ne sont pas enfermés idéologiquement à gauche ou à droite. Il faut gérer une nation, un État, un pays, il faut être pragmatique, visionnaire et indépendant d'esprit. C'est ce dont nous avons besoin au plus vite si on veut avoir les moyens de se payer un autre projet de société.