Le Québec n'autorise toujours pas de nouveaux traitements contre le cancer qui sont pourtant offerts ailleurs au Canada.    

Dans une lettre publiée dans La Presse le 22 octobre 2010, je décriais le retard que prend le Québec dans le remboursement public des traitements reconnus pour traiter plusieurs types de cancers. Je soulignais également les problématiques dans l'évaluation de ces nouveaux traitements par le Conseil du médicament de l'époque. Entre autres, l'absence de représentation au Conseil de cliniciens experts en oncologie a mené à l'absence de reconnaissance de la simple valeur thérapeutique de plusieurs produits évalués entre 2007-2010. En bout de ligne, une importante discordance existe désormais entre les traitements disponibles pour traiter le cancer au Québec et ceux disponibles dans les autres provinces.

Depuis la publication de ma lettre, le ministre de la Santé, Yves Bolduc, a chapeauté le remplacement du Conseil du médicament par une nouvelle agence, l'Institut national d'excellence en santé et en service Sociaux (INESSS) dont le mandat est relativement similaire à celui du Conseil du médicament en ce qui concerne l'évaluation des nouveaux traitements pour le cancer. L'INESSS a intégré au processus d'évaluation plusieurs médecins spécialisés dans le traitement du cancer afin d'avoir un avis plus équilibré sur la valeur thérapeutique de ces traitements. Par contre, comme par le passé, l'INESSS a continué de travailler à huis clos, sans l'équipe de spécialistes, dans l'évaluation de la valeur économique du médicament.

Le résultat du nouveau processus de l'INESSS est tout aussi catastrophique pour les patients atteints de cancer que celui du Conseil du médicament. L'implication des médecins experts a permis de changer radicalement la reconnaissance de la valeur thérapeutique des nouveaux médicaments contre le cancer. Mais la structure rigide du ministère de la Santé continue d'imposer une politique de refus quasi systématique de nouveaux traitements par une évaluation sévère du coût des traitements.

La lutte contre le cancer est en train d'être perdue sur le terrain sur la base d'une non-valorisation par les autorités ministérielles de l'importance vitale de ces nouveaux médicaments pour nos patients. Le Québec n'a plus les moyens d'offrir une médecine de qualité à ses citoyens. Le fardeau économique des nouveaux médicaments contre le cancer semble tout simplement trop important pour une province comme le Québec.

Chaque jour, dans chaque clinique d'oncologie du Québec, un patient se fera dire qu'il existe un bon traitement pour son type de cancer, mais qu'il n'est pas disponible faute de budget. Malgré l'insistance et la supplication du médecin traitant et son patient, l'accès à ce médicament lui sera bloqué par l'administration de l'hôpital ou la RAMQ. On lui dira que c'est un choix de budget et que le gouvernement n'a pas jugé ce médicament suffisamment rentable. Pourtant, le prix de tous les médicaments est déterminé à la suite d'une négociation entre le manufacturier et le gouvernement fédéral.

À mon avis, le processus d'approbation de nouveaux médicaments au Canada et plus particulièrement au Québec est en déroute. Pourquoi tant de refus au Québec alors que la très grande majorité des innovations importantes en oncologie sont reconnues par Santé Canada? Pourquoi déterminer un prix de vente au détail au niveau fédéral s'il sera jugé irrecevable dans certaines provinces alors que d'autres vont l'accepter?

Deux pistes de solution s'imposent. Premièrement, il est obligatoire d'harmoniser le processus d'approbation et de négociation des prix des nouveaux médicaments à l'échelle canadienne. Un médicament disponible publiquement à Fredericton devrait l'être tout aussi bien à Rimouski. Le prix jugé acceptable au Nouveau-Brunswick devrait l'être au Québec de façon systématique. Un processus clair et ouvert de négociation des prix est essentiel afin d'atteindre cet objectif.

Deuxièmement, les règles d'utilisation équitable de ces médicaments doivent être coordonnées par les spécialistes de ces domaines et non par des fonctionnaires du ministère. La science, et non la politique, devrait déterminer si un médicament en vaut la peine.

Si ultimement, le budget de la santé n'est plus en mesure de payer pour le traitement des patients atteints de cancer, qu'on leur propose un plan, car mes mains à moi sont liées actuellement.