Jusqu'à tout récemment, le Québec était considéré par les dirigeants de sociétés minières du monde entier comme la juridiction ayant le meilleur environnement politique du monde pour les investissements. Cela s'explique essentiellement par la présence d'un environnement réglementaire prévisible, l'absence de revendications territoriales dans le Nord québécois, des données géoscientifiques de haute qualité facilement accessibles pour les mineurs, de bonnes infrastructures, une main-d'oeuvre qualifiée, et un régime d'imposition compétitif. Pourtant, le projet de loi 14 visant à modifier la Loi sur les mines, déposé le printemps dernier, introduit un niveau élevé d'incertitude susceptible d'effrayer les investisseurs et d'endommager sérieusement l'attrait du Québec pour les investissements miniers.

Le projet de loi 14 octroie aux municipalités ce qu'elles ont revendiqué lors du débat passionnel sur la réglementation de l'industrie du gaz de schiste, à savoir de nouveaux pouvoirs pour contrôler les activités minières sur leur territoire. Cette évolution pose deux problèmes. D'abord, le gouvernement du Québec ne sera plus la seule entité responsable de la gestion des ressources minières. De plus, elle constitue un obstacle supplémentaire aux investissements miniers qui sont à l'origine d'emplois bien rémunérés dans de nombreuses communautés de la province.

Jusqu'à présent, la gestion provinciale du secteur minier a été caractérisée par une grande certitude concernant les règles du jeu et un processus transparent et prévisible, autant d'éléments qui ont joué un rôle important dans l'attrait de la Province pour les investisseurs du monde entier. Voilà pourquoi le Québec s'est classé à la première place de l'enquête sur les sociétés minières de l'Institut Fraser pendant trois années consécutives, de 2008 à 2010.

Si le projet de loi 14 est adopté, plus de 1000 municipalités, la plupart sans l'expérience, l'expertise ou la connaissance nécessaires, mettront en oeuvre, dans leurs juridictions respectives, des règles différentes appliquées sur une base individuelle.

L'article 91 du projet de loi 14, stipule que tout terrain compris à l'intérieur d'un périmètre d'urbanisation et tout territoire affecté à la villégiature sont soustraits au jalonnement, à la désignation sur carte, à la recherche minière ou à l'exploitation. Il stipule également que les titulaires de claims situés à l'intérieur d'un territoire ainsi soustrait doivent, pour exécuter des travaux, obtenir le consentement de la municipalité locale concernée. Pourtant, les conséquences qu'entraîne l'impossibilité d'exécuter les travaux en raison du défaut d'obtenir une telle autorisation ne donneront lieu à aucune indemnité de la part de l'État.

Cela signifie que les détenteurs de claims qui ont déjà investi des millions dans l'exploration d'une parcelle d'un terrain minier appartenant à l'État encourent le risque de perdre, de manière rétroactive et sans compensation, leur droit légalement acquis d'explorer et de développer des minéraux.

À l'avenir, les décisions concernant le développement minier dans les municipalités risquent de devenir politisées et instables en raison, d'une part, du pouvoir de veto des municipalités sur l'exploration minière et le développement et, d'autre part, parce que les administrations qui changent tous les quatre ans sont susceptibles d'avoir des opinions divergentes au sujet d'un même projet minier.

Les politiques publiques peuvent soit stimuler, soit diminuer l'investissement minier. Avec le projet de loi 14, le gouvernement libéral envoie un message contradictoire aux investisseurs. Il donne en effet l'impression qu'il cherche à la fois à attirer de manière active des investissements miniers à travers le monde dans le cadre du Plan Nord, tout en les décourageant sous le 49e parallèle pour apaiser une opinion publique de plus en plus hostile à l'exploitation des ressources minérales. C'est une stratégie risquée qui pourrait amener les investisseurs à opter pour d'autres juridictions et endommager de manière durable la capacité du Québec à attirer des investissements.