Le parc Westmount, situé à 10 minutes de la station de métro Atwater, est un joyau historique du paysage urbain en Amérique du Nord. Il est aussi une partie importante du patrimoine du Québec et de l'héritage Olmsted du Canada.

Créé en 1898, le parc suivait, dès son début, les principes de Frederick Law Olmsted, créateur de Central Park à New York et du parc du Mont-Royal à Montréal. En août 1899, les frères Olmsted ont fait un rapport sur le parc Westmount. Ils ont souligné «l'effet du paysage (qui créait) une jouissance tranquille de la vue».

Pendant plus d'un siècle, cet endroit si beau, aux fonctions multiples, est resté extrêmement populaire, tellement que l'architecte-paysagiste montréalais Marc Fauteux a constaté en juillet 2009 que le parc avait atteint ses limites écologiques: «Il se dégage un sentiment de saturation dans les parcs à Westmount au niveau de la capacité d'accueillir de nouvelles installations sans nuire sérieusement à l'intégrité des parcs et à leur caractère paysager.»

Le parc Westmount est un espace polyvalent, dont les champs offrent l'illusion de la campagne en pleine ville. Le matin surtout, les promeneurs traversent cet espace vert et y trouvent une tranquillité insolite en regardant les étangs, les arbres et la petite chute d'eau.

C'est justement cet héritage reconnu que la Ville de Westmount est en train de spolier.

Dans un endroit déjà parvenu à un niveau de saturation, le conseil municipal de Westmount et son maire Peter Trent insistent pour boudiner le parc avec un méga-projet incongru et disproportionné. Deux patinoires de hockey LNH souterraines, qui seront installées dans un trou profond, 12 mètres sous le parc!

Le remplacement complet de l'infrastructure sportive existante, en respectant son empreinte écologique, n'était pas suffisant d'après le conseil et le maire.  Il fallait absolument doubler l'espace réservé au hockey sans se soucier de la pollution, de la dégradation du site et de la démographie réelle de Westmount.

Le coût: 37 millions de dollars, plus coûteux que le Complexe sportif Bell à Brossard. L'argent sera donné par les contribuables provinciaux, fédéraux et locaux. Dans la loterie des subventions, Westmount a gagné le gros lot! Une subvention provinciale astronomique de 10 millions de dollars, doublée d'une autre de 10 millions du gouvernement fédéral. Westmount recevra six fois plus per capita en subventions que la Ville de Laval recevra pour son complexe sportif, par exemple.

Ainsi, les citoyens de partout vont payer pour un projet qui ruinera la partie sud-ouest d'un «ensemble paysager et civique rassembleur», selon les termes employés par Marc Fauteux dans son plan directeur.

Pourquoi? Qui gagne? Apparemment, une école privée pour garçons, Selwyn House School, qui écrivait dans son magazine Veritas (2009-2010): « Nous avons bon espoir que cette opportunité (partenariat aréna) parviendra à donner à Selwyn House ces équipements sportifs si nécessaires.»

Déjà partiellement subventionnée par l'État québécois, l'école semble y voir une occasion en or grâce au programme de subventions pour les infrastructures.

Autres gagnants : les hommes d'affaires qui veulent absolument jouer leur hockey le soir? Hockey Québec? Ou est-ce un projet pour la vanité de la ville, et du maire qui aime tant donner des leçons à ses pairs?

Qui sait? Jacques Chagnon, le député? Ou Jean Charest, qui surveillait la situation de sa maison sur une colline à Westmount?

Mais ce qui est sûr: la communauté est divisée. Le maire a cherché l'appui de 1800 foyers dans un sondage, mais depuis, les citoyens en colère ont déjà recueilli plus de 1500 signatures pour modifier le projet existant. Et le nombre de critiques augmente.

Entre-temps, le parc centenaire attend, un peu sauvage, fasciné par ces êtres humains qui dépensent des millions pour des arénas farfelus pendant que des ponts tombent sur leur tête...