À la suite du verdict de ne pas tenir Guy Turcotte criminellement responsable du meurtre de ses deux enfants, le directeur des poursuites criminelles décide d'en appeler de cette décision. Il semblerait que le juge Marc David pourrait avoir erré en droit en certaines occasions, ce qui ouvrait la porte à un appel.

Le jury a rendu une décision unanime, basée sur des faits. Ce n'est pas ce verdict qui pose problème. Ce seraient les erreurs de droit et les consignes faites et émises par le juge qui n'auraient pas permis aux jurés d'en arriver à un jugement de responsabilité, donc de culpabilité, selon l'analyse du directeur des poursuites criminelles.

Cette demande d'en appeler survient dans les délais prescrits par la loi, mais également, à la suite du tollé de la population lorsqu'elle prenait connaissance du verdict rendu. Le procès fut long et accablant pour les familles concernées et a soulevé l'indignation de la population. «On ne tue pas ses enfants.» «Quel être humain peut trucider sa progéniture de la sorte?» Tels étaient les deux commentaires les plus souvent lus et entendus dans les médias écrits et électroniques.

Était-ce réellement nécessaire d'en appeler du verdict? La question se pose et il y a des arguments en faveur et des arguments contre. La permission d'en appeler se fait sur des questions de droit. Or, si la Cour d'appel juge que le juge Marc David n'a pas fait d'erreurs de droit, ce qui se pourrait fort bien, alors, le verdict de non-responsabilité criminelle tiendra et ce malheureux événement finira par disparaître de nos écrans radars.

Dans le cas contraire, il y aura un nouveau procès qui fera revivre cette saga aux familles concernées déjà bouleversées ainsi qu'à la population québécoise. Au terme de ce second procès, il se pourrait que le verdict soit le même. Il se pourrait également que Guy Turcotte soit reconnu criminellement responsable et soit condamné à une peine de prison.

Ce qui me dérange dans cette décision d'en appeler, c'est que les Québécois ont crié vengeance à la suite du verdict, malgré des appels au calme d'Isabelle Gaston, la mère des deux enfants. Les Québécois, à la suite des deux questions posées par le quotidien La Presse, se sont prononcés à 61% en faveur d'un internement psychiatrique d'au moins 10 ans, alors qu'ils étaient 60% à être en désaccord avec le verdict du jury.

Le verdict des Québécois a été rendu dans cette affaire et ceux-ci ne seront satisfaits que si Guy Turcotte est tenu criminellement responsable du meurtre de ses deux enfants. Comment voulez-vous être en mesure de choisir maintenant les membres d'un jury sur lesquels la pression sera encore pire? Comment réussira-t-on à trouver des personnes qui n'auront pas entendu parler du procès et qui se diront tout à fait objectives devant la situation?

Et si d'aventure on choisit un procès devant juge seul, et que le verdict premier de criminellement non responsable était maintenu, comment alors réagirait la population québécoise?

En faisant appel, il est à se demander si le directeur des poursuites criminelles ne tient pas à se protéger de l'acharnement populaire à vouloir absolument reconnaître Guy Turcotte criminellement responsable de ses actes.

Nous avons le devoir de nous reposer la question. Était-ce réellement nécessaire d'en appeler de cette décision?