Les détracteurs de la situation actuelle de l'échographie ont raison d'affirmer que la mixité publique et privée est en fait un ticket modérateur. En pratique active depuis plus de 25 ans, j'ai constaté que ceux qui ont recours aux services privés sont rarement riches, mais recherchent un service différent et non offert en milieu public, comme des horaires permettant des rendez-vous très tôt le matin, en soirée ou les week-ends.

Ces patients considèrent que perdre une journée de travail à attendre dans un milieu hospitalier débordé a des impacts économiques majeurs sur leur vie. Ils ont aussi le privilège de bénéficier d'une technologie récente et souvent renouvelée.

Mais il y a beaucoup plus important encore: les patients ayant recours aux services privés sont conscients et fiers de laisser leur place dans le secteur public à ceux qui n'ont pas d'autres options.

L'omniprésence du centre hospitalier dans le milieu de la santé est un paradigme qui ne tient plus la route. Travaillant moi-même dans un hôpital, je ne peux comprendre qu'on y examine encore autant de patients dans une structure aussi complexe et lourde. Le coeur m'arrête chaque fois que je vois la jeune maman qui vient passer son échographie obstétricale tout en surveillant son bambin de 2 ans assis au sol en jouant là où se trouvait un patient des soins intensifs quelques minutes auparavant.

Travailleurs autonomes

Et qu'en est-il du travailleur autonome en congé de maladie et bon dernier d'une longue liste d'attente dans laquelle on ne trouve qu'une clientèle principalement issue des urgences ou du service d'oncologie? Malheureusement, ce travailleur attendra des mois avant de subir un examen pour la déchirure tendineuse dont il souffre. L'examen radiologique dans les centres hospitaliers doit être réservé aux clientèles lourdes et complexes.

Mais où est donc la solution? Certains organismes l'ont déjà trouvée. C'est le cas de la CSST, de la SAAQ, de plusieurs grandes entreprises, des compagnies d'assurance et de quelques rares hôpitaux. Grâce à des ententes négociées, ils recourent presque exclusivement aux services privés sans avoir à supporter eux-mêmes un lourd plateau technique qu'il faut renouveler fréquemment et à grands frais.

À titre d'exemple, le patient traumatisé de la route en milieu urbain qui présente une douleur à l'épaule aura accès rapidement aux services diagnostiques en milieu privé. Nous voyons là une situation gagnante pour tous.

La couverture complète de l'échographie par la régie de l'assurance maladie est évidemment une solution envisageable, mais à quel prix? Dans les faits, la facture serait exorbitante, de l'ordre de plusieurs centaines de millions de dollars. Certaines cliniques privées réalisent déjà autant d'examens échographiques que plusieurs grands hôpitaux de la région métropolitaine.

En outre, une affluence nouvelle et incontrôlée va limiter encore plus l'accessibilité en la généralisant à l'ensemble de la population. À cet égard, l'analogie avec l'incapacité des médecins de famille à couvrir les besoins de la population est assez évidente.

La collaboration public-privé doit être vue comme l'informatique et le cellulaire des années 80, c'est-à-dire une réalité incontournable.

De l'avis de plusieurs radiologistes, l'échographie doit faire l'objet d'une sous-traitance ciblée, déjà réalisée avec succès par certaines grandes entreprises. Les cliniques privées de radiologie sont actuellement prêtes à négocier des ententes avec les centres hospitaliers. Elles pourraient accueillir une grande partie de la clientèle ambulante permettant ainsi au milieu hospitalier de dispenser des services de qualité à une clientèle plus lourde.

Les cliniques privées de radiologie ont démontré depuis plusieurs années leur efficacité et leur savoir-faire. Les radiologistes québécois sont parmi les meilleurs échographistes en Amérique du Nord. On devrait peut-être les écouter...