L'auteur gère les programmes Pauvreté rurale et environnement et Adaptation aux changements climatiques en Afrique au Centre de recherches pour le développement international.Les manchettes qui nous proviennent d'Afrique de l'Est cette semaine ne sont pas réjouissantes: en raison de la sécheresse qui perdure, la faim et la famine menacent des millions de personnes.

Du Burundi à la Tanzanie, des habitants par millions luttent pour leur survie. Étant donné que la sécheresse de cette année est la quatrième en 10 ans, ses effets sont beaucoup plus dévastateurs que ceux avec lesquels les populations de la région pourraient normalement composer.

Des crises de ce genre risquent de devenir de plus en plus fréquentes et graves à mesure que se feront sentir les répercussions des changements climatiques. Bien que la portée de ces répercussions fasse toujours l'objet de débats, le Programme des Nations unies pour le développement et d'autres organismes crédibles craignent que des millions d'autres personnes ne soient frappées par des pénuries d'eau et d'aliments, qui compromettront encore davantage leur santé et leur vie. La chute des rendements agricoles, qui engendrerait une aggravation de la faim, est l'un des effets qui pourraient s'avérer les plus désastreux. On pourrait assister à une propagation des maladies sensibles au climat, telles que la malaria et la fièvre de la vallée du Rift, qui entraverait la production animale. À l'autre extrême, les inondations pourraient détruire l'infrastructure du stockage des aliments et de leur transport des zones de production jusqu'aux marchés. La hausse du niveau des océans pourrait inonder les côtes partout dans le monde, menaçant certaines des villes les plus pauvres de la planète.

Parce qu'ils possèdent moins de ressources sociales, technologiques et financières pour s'y adapter, ce sont les pays en développement qui sont les plus menacés par les changements climatiques. À mesure qu'on perdra des biens et qu'on réaffectera les ressources pour répondre aux urgences plutôt que de favoriser le développement, les populations vulnérables seront encore plus menacées.

Il est capital de préparer ces populations aux changements à venir et de renforcer leurs capacités d'y faire face. Cela suppose l'adoption de mesures qui réduiront les pertes au minimum ou qui permettront de tirer parti des occasions qui surgiront.

Il se dégage des travaux de recherche appuyés par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), une société d'État canadienne, de précieuses leçons sur les moyens que peuvent prendre les collectivités pour faire face à la variabilité et aux changements climatiques dans certains des milieux les plus perturbés de la planète.

L'une de ces leçons : de l'information et des conseils fiables doivent faire partie intégrante des mécanismes de défense de première ligne. Des équipes de recherche au Bénin, au Kenya, au Sénégal et en Tanzanie mettent à l'essai divers moyens d'améliorer l'accès des populations rurales à l'information sur le climat. Jusqu'à maintenant, les constatations confirment le fait que les populations rurales ont besoin de prévisions et d'avis formulés dans une langue et sous une forme qu'elles sont en mesure de comprendre et provenant de sources auxquelles elles font confiance. Des prévisions améliorées leur permettent de faire des choix plus avisés au sujet de la nature et du calendrier des cultures.

Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, qui comptent déjà parmi les régions les plus arides de la planète, les chercheurs ont trouvé des moyens d'accroître la disponibilité et la qualité de l'eau en gérant la demande et en modifiant les mentalités au sujet de sa consommation. L'Initiative régionale concernant la demande d'eau a appuyé des moyens innovateurs de réutiliser les eaux grises d'origine domestique, les eaux souterraines salines et les effluents d'eaux usées pour irriguer les cultures.

Les recherches menées par des équipes en Afrique, en Asie et en Amérique latine nous ont aussi appris qu'il valait mieux élaborer les stratégies d'adaptation à l'échelon local, en harmonie avec les besoins de chacune des collectivités. Nous avons compris que l'efficacité des mesures n'est pas toujours fonction de la mise en oeuvre de grands travaux d'ingénierie tels que des ouvrages de protection du littoral contre la hausse du niveau de la mer. De récentes recherches réalisées au Maroc laissent entendre, par exemple, que des approches d'un autre ordre et moins coûteuses, telles que la protection des milieux humides côtiers qui constituent des zones tampons naturelles et la révision des plans d'aménagement des zones côtières, pourraient être tout aussi efficaces.

En Inde, au Népal et au Pakistan, dans les régions vulnérables aux inondations et à la sécheresse, des scientifiques qui travaillent en collaboration avec les collectivités ont constaté que les avantages de la gestion des risques de catastrophes - par l'entremise d'assurances et de mesures d'alerte rapide, par exemple - sont presque toujours supérieurs aux coûts.

À court terme, ce sont peut-être les pays pauvres qui subiront le plus intensément les effets des changements climatiques, mais nous sommes loin d'être à l'abri. Il est clair que tous ont un rôle à jouer : ceux qui doivent adapter leur mode de vie, par exemple, en mettant à l'essai et en adoptant des variétés de cultures à maturation rapide, résistantes à la sécheresse et aux maladies; les scientifiques du monde entier, pour mettre au point ces variétés; et la communauté internationale et les organismes gouvernementaux, pour produire, en temps opportun, des prévisions précises et faire connaître les approches fructueuses.

Il est en outre tout aussi important que les gouvernements et les organismes voués au développement intègrent l'adaptation aux changements climatiques dans les plans de développement, sans quoi ils continueront de réagir aux urgences plutôt que d'agir pour les éviter.