La CSN et la FTQ ont profité de leur conférence de presse de fin d'année pour faire connaître leur vision de la manière dont le Québec devrait se protéger contre la crise économique qui secoue la planète. Si certaines propositions ont du mérite, l'approche prônée par les centrales risque d'avoir des effets néfastes plus importants que leurs éventuels bénéfices.

La CSN promet de faire de la rémunération des travailleurs une de ses priorités en 2009. Selon la présidente, Claudette Carbonneau, «une des causes (de la crise) est très certainement la dégradation de la rémunération des travailleuses et des travailleurs». Une augmentation des salaires stimulerait la consommation, et donc l'économie.

 

Cette perception des choses n'est pas fondée. Les revenus des Québécois ont augmenté au cours des dernières années, pas diminué. Selon les données de l'Institut de la statistique du Québec, le revenu personnel disponible réel, c'est-à-dire en tenant compte de l'inflation, a augmenté de presque 4000$ depuis 1999.

Dans le secteur privé, une stratégie syndicale qui viserait à obtenir des augmentations de salaire auprès d'entreprises dont les marchés se ferment, qui ont du mal à emprunter et qui croulent sous le fardeau des régimes de pension serait particulièrement mal avisée.

Dans le secteur public, la situation comparative des employés de l'administration provinciale s'est améliorée en 2008. Et s'il est vrai que la rémunération globale des fonctionnaires du Québec reste légèrement plus faible que celle des autres salariés, il faut tenir compte de l'avantage que constitue la sécurité d'emploi et du fait que les fonctionnaires travaillent moins d'heures que leurs camarades du secteur privé.

Enfin, les syndicats savent que les finances publiques seront très serrées, sinon déficitaires, au cours des prochaines années. Drôle de moment pour exiger des augmentations de salaire!

Du côté de la FTQ, on suggère une intervention massive de l'État québécois. «Il faut que soient utilisés à leur pleine mesure les outils de développement que sont la Caisse de dépôt, le Fonds de solidarité, la SGF, Investissement Québec, le Mouvement Desjardins», a déclaré le président de la Fédération, Michel Arsenault. Que Québec mette en place des mesures ciblées pour venir en aide à des secteurs en restructuration et pour des travailleurs sans emploi, nous en sommes. Mais il ne saurait être question que le gouvernement aggrave sa situation financière par des dépenses et investissements inconsidérés qui ne produiraient pas les résultats escomptés.

Faut-il rappeler que l'État québécois dépense déjà beaucoup plus par habitant que les gouvernements des autres provinces (9400$ contre 7200$ en Ontario), tandis que sa dette nette est beaucoup plus lourde (16 000$ par habitant contre 11 200$ en Ontario)?

M. Arsenault dénonçait cette semaine l'«économie de Monopoly créée par les grands consortiums et les banques». Justement, le gouvernement du Québec ne gère pas de l'argent de Monopoly, mais les impôts versés par les contribuables. Les centrales syndicales devront garder cela à l'esprit pendant cette année cruciale pour l'économie du Québec.