Depuis le début de cette année, la croissance économique ralentit en Chine. De janvier à septembre, elle a été de 9,9%, contre 12,2% au cours de la même période de 2007.

Ce ralentissement s'est accentué récemment puisqu'en octobre dernier la production industrielle a augmenté de seulement 8,2%, contre 18% en octobre 2007. Et comme c'est l'industrie qui habituellement tire la croissance économique d'ensemble, celle-ci a dû tomber en dessous de 8%. La baisse de la production d'électricité (moins 4% en octobre), qui est un bon indicateur d'activité, confirme cette tendance.

 

Le ralentissement a d'abord des causes internes. Après quatre années de croissance accélérée, marquée par des investissements massifs dans l'industrie et l'immobilier, 2008 marque le moment du retournement du cycle. Le resserrement de la politique de crédit depuis le début de l'année visait d'ailleurs à freiner une croissance trop forte et créant des tensions inflationnistes.

Ce ralentissement a aussi des causes structurelles. L'industrie chinoise a fait face à une augmentation de ses coûts salariaux et l'appréciation du yuan par rapport au dollar (" 10% depuis un an) accentue la perte de compétitivité de secteurs comme le textile. La province de Canton, spécialisée dans la fabrication de produits à bas prix pour l'exportation, est particulièrement touchée. Les usines de vêtement ferment et la production migre vers les pays voisins où les coûts du travail sont moindres, comme au Vietnam.

Demande extérieure

À ces facteurs internes s'ajoute désormais le ralentissement de la demande extérieure, qui risque de forcer l'économie chinoise à un «atterrissage» brutal. Au cours des 10 premiers mois de 2008, les exportations chinoises ont continué à progresser assez rapidement vers l'Europe et ont fortement augmenté vers l'Amérique latine et l'Afrique. Mais, dans les mois qui viennent, la baisse de la demande mondiale va faire sentir tous ses effets sur les exportations et donc sur l'activité industrielle en Chine.

L'urgence est désormais de relancer la demande interne et les autorités ont annoncé un programme de mesures pour soutenir la croissance. Chiffré à 4000 milliards de renminbis (586 milliards de dollars), soit environ 8% du produit intérieur brut en 2009-2010, ce montant est gigantesque, mais inclut à la fois des mesures nouvelles et des dépenses déjà programmées.

Le gouvernement central financera environ 30% du programme, le reste étant à la charge des autorités locales, des entreprises et autres investisseurs. Le budget central déboursera une première tranche de 14 milliards d'ici la fin de l'année. Le programme inclut le financement d'infrastructures (dans les transports, l'agriculture, le logement), des dépenses sociales (santé et éducation), des allègements fiscaux, le soutien des prix agricoles.

La croissance en 2009 dépendra de la mise en oeuvre de ce programme et de sa capacité à compenser les effets de la baisse de la demande extérieure. La conjonction des obstacles internes à la relance et de la récession mondiale pourrait faire tomber la croissance à 7,5% l'année prochaine, le rythme le plus bas que le pays ait connu depuis 1998 lors de la crise asiatique.

Lemoine, Françoise

L'auteure est économiste senior au Centre d'études prospectives et d'informa-tions interna-tionales à Paris.