Il y a 50 ans, Jean Drapeau était élu maire de Montréal. Il le demeurera pendant 26 ans. Quel souvenir gardez-vous de lui?

Celui d'un visionnaire qui a obtenu l'Expo 67, les Jeux olympiques de 1976, et fait construire le métro et la Place des Arts? Ou celui d'un mégalomane qui a laissé une dette de 2 milliards avec le fiasco du Stade?

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Un héritage lourd

Je trouve singulièrement limitatif de doser les pour et les contre d'une figure politique de ce genre, en se restreignant  aux bâtisses, mausolées et cénotaphes divers qu'il a fait ériger par d'autres et à leurs coûts, moins historiques que pécuniaires. Je me souviens surtout de l'autocrate hargneux, roué et méthodique oeuvrant à la destruction du FRAP (Front d'action politique, parti municipal populaire, dissous en 1973) en l'amalgamant tapageusement au FLQ et, dans le mouvement, imprégnant la grande administration municipale montréalaise de cet autocratisme populiste, tracassier et opaque qui sera, lui, finalement, son véritable héritage personnel durable. La continuation du duplessisme par d'autres moyens, en fait, ceux coulant insidieusement dans les grandes catacombes urbaines de notre toute petite «terre des hommes».

Paul Laurendeau

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Un maire mégalomane

De beaux rêves et de belles réalisations grandioses aux frais de tous les contribuables québécois, et cela a coûté un bras, pour ne pas dire que c'était un gouffre sans fin, avec ce qu'il reste encore à payer aujourd'hui de frais d'entretien ou de démolition. Les Jean Drapeau, tout comme les Régis Labeaume, ont le droit de rêver, mais qu'ils réalisent donc leurs rêves de grandeur sans puiser dans les poches des contribuables. Les Québécois n'ont pas besoin de maires mégalomanes, mais de gestionnaires lucides, conscients et qui se soucient du bien-être de leurs concitoyens...

Francine Vézina

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Vivement un autre Drapeau

Je trouve aberrant que 40 ans plus tard on lie encore le maire Drapeau au fiasco financier du Stade olympique alors que les véritables responsables sont le gouvernement du Québec et la RIO. Le site de l'ingénieur du stade Claude Phaneuf (https://www.stadeolympiquemontreal.ca/) fait toute la lumière sur ce scandale où on voit bien que c'est la RIO, une création du gouvernement du Québec de Robert Bourassa, qui est responsable de la presque totalité de la dette du stade. On apprend aussi sur le site de M. Phaneuf que les scandales de la construction associés au PLQ, avec SNC-Lavalin et les syndicats, ne datent pas d'hier et que la commission Malouf est une supercherie. En plus du métro, de la Place des Arts, de l'Expo et de l'autoroute Ville-Marie (qui devait être prolongée jusqu'au tunnel Lafontaine), on oublie aussi que le premier grand festival montréalais, le Festival international de jazz de Montréal, père de tous les autres festivals montréalais qui suivirent, vient aussi de la fin de l'ère Drapeau. Même les premières pistes cyclables viennent de ce grand maire sans qui Montréal ne serait pas la même. Vivement un autre Drapeau! Ça presse!

Yves Capuano

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Un visionnaire

Vous savez ce qui manque au monde politique aujourd'hui? Ce sont des visionnaires, des rêveurs, des humanistes, des gens qui voient plus loin que le bout de leur nez, des gens ambitieux, des gens qui veulent voir grandir leur ville et non seulement leurs poches. Jean Drapeau était un visionnaire et c'est grâce à lui que Montréal est aujourd'hui sur la carte. C'est vrai que les Jeux olympiques de 1976 ont couté chers aux contribuables, mais nous avons eu la chance d'être une ville olympique, la première au Canada. De plus, il ne faut pas oublier que l'Expo 67 était l'une des Expositions universelles les plus célèbres de l'histoire. Nous devons à Jean Drapeau de nombreux projets, comme le métro et la Place des Arts. Imaginez comment serait Montréal aujourd'hui si le maire Drapeau n'avait pas existé. Est-ce que Montréal aurait été connue à échelle internationale? Aujourd'hui, l'héritage de Drapeau va plus loin que l'on pense; le Quartier des spectacles ne serait rien sans la Place des Arts, pensez aussi à la Formule 1, au Parc des Îles, au Casino, à La Ronde. Sans Terre des Hommes? Que serait le transport en commun sans le métro? Souvent, on blâme le maire Drapeau pour des problèmes que Montréal a connus, mais il ne faut pas oublier que c'est plutôt à cause du Parti québécois et son projet souverainiste que Montréal a perdu des plumes au cours des années. Même si cette réflexion peut sembler simpliste pour certains, c'est une vérité qui bien des gens oublient; si le PQ n'était pas parvenu au pouvoir, nous n'aurions évidemment pas vécu de référendum sur la souveraineté du Québec, donc Montréal serait encore la métropole du Canada. Drapeau aura toujours raison: «Laissons Toronto devenir Milan, Montréal restera toujours Rome.» Il est temps de redonner à Montréal ce qui lui revient: des chefs visionnaires.

Jean Lahoud