Le 22 février dernier, nous apprenions qu’un projet de salon de jeux au Centre Bell était en pourparlers entre Loto-Québec et le Groupe CH, propriétaire du club de hockey Canadien. Pour les Tables de quartier ayant pour mission de contribuer à l’amélioration des conditions de vie dans les quartiers autour du site envisagé, ce projet suscite de vives inquiétudes.

Monsieur Legault, installer 350 appareils de loterie vidéo (ALV) en plein cœur du centre-ville de Montréal aurait des conséquences désastreuses sur la population, particulièrement celle de Peter-McGill, Petite-Bourgogne et des autres quartiers du Sud-Ouest, qui font partie de la zone de vulnérabilité identifiée par la Santé publique. Avec ce projet, Loto-Québec va accroître ses revenus sur le dos des personnes les plus à risque et c’est tout à fait inacceptable.

Les effets néfastes des appareils de loterie vidéo ont été démontrés à maintes reprises. Ce sont des dispositifs qui entraînent le développement de pathologies du jeu pour environ 16 % des joueurs, un risque beaucoup trop élevé. Une étude menée en 2019 a démontré que quatre dollars sur cinq qui y sont insérés proviennent de ces mêmes joueurs1. Notons, de surcroît, qu’il n’y a aucune limite quotidienne de pari dans ces appareils au Québec.

Déjà en 2016, Loto-Québec s’engageait à diminuer le nombre d’appareils de loterie vidéo, connaissant les risques associés. Le projet en discussion ne reflète pas cette volonté.

Même en diminuant le nombre de ces appareils dans quelques bars du secteur, leur concentration importante au cœur du centre-ville de Montréal pose un risque important pour la population en général et particulièrement pour les personnes en situation de vulnérabilité.

17 ans plus tard

C’est d’ailleurs pour ces raisons, ainsi que pour le contrôle de la criminalité, qu’en 1993 le Casino de Montréal a été isolé sur l’île Notre-Dame. C’était un choix de société ! Rappelons également que le projet de déménager le Casino au bassin Peel à Pointe-Saint-Charles en 2006 a été abandonné, à la suite d’une forte mobilisation locale et de rapports gouvernementaux qui confirmaient les impacts d’un tel projet : problèmes sociaux et de santé liés au jeu, enjeux de sécurité publique, circulation automobile, etc. L’avis de la Santé publique, dévastateur, disait même à l’époque que le secteur était le pire endroit à Montréal⁠2 où déménager le casino et ses machines à sous, à proximité des populations défavorisées des quartiers environnants. Pourquoi revenir avec une telle idée 17 ans plus tard ?

Monsieur Legault, comme vous l’avez si bien dit en septembre 2016 : « On est tous responsables d’avoir maintenu beaucoup trop longtemps les fameux appareils loto vidéo dans les bars. On connaît aujourd’hui les drames humains : des pères, des mères de famille qui vont se ruiner en jouant.⁠3 »

Pour toutes ces raisons, Monsieur le Premier Ministre, il est temps de ramener Loto-Québec à l’ordre et de signifier directement que ce projet ne fait l’objet d’aucune acceptabilité sociale.

1. Lisez le texte (en anglais) : « Gambling spending and its concentration on problem gamblers » 2. Lisez l’article du Devoir : « Le bassin Peel, le pire endroit pour un casino » 3. Lisez l’article du Journal de Montréal : « Machine de loterie vidéo : une diminution, mais pas d’échéancier »

* Cosignataires : Stéphane Febbrari, Table de quartier Peter-McGill ; Karine Triollet, Action-Gardien, CDC de Pointe-Saint-Charles ; Géraldine Garceau-Pellerin, CDC Solidarité Saint-Henri ; Assia Kada, Concertation Ville-Émard/Côte-Saint-Paul ; Yves Bellavance, Coalition montréalaise des Tables de quartier (CMTQ)

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