Médecins québécois pour le régime public (MQRP) a bien pris acte des récents reportages sur les délais d’obtention des permis de certains centres médicaux spécialisés (CMS) en orthopédie et en chirurgie plastique.

Actuellement et à très court terme, les CMS peuvent temporairement aider à diminuer certaines listes d’attentes en chirurgie liées au retard accumulé pendant la pandémie. C’est une approche de réduction des méfaits. Cependant, de la même manière que les agences privées de placement, c’est l’existence même des CMS à moyen et long terme qu’il faut remettre en question.

Les différents gouvernements récents ont encouragé le développement des CMS, ces structures privées qui sous-traitent la prise en charge de patients du réseau public. Ces entreprises sont donc largement subventionnées dans leur mission lucrative : les contrats établis avec le gouvernement prévoient d’emblée une marge de profit à leurs propriétaires, payée à même les fonds publics. Des marges de profit allant jusqu’à 15 % ont été signées avec différents CMS depuis la pandémie⁠1.

Il est impensable que des patients doivent attendre plus d’un an ou deux pour une opération médicalement nécessaire dans le système public. Mais la solution ne peut passer par l’établissement d’un système privé parallèle au réseau public.

Opérer un patient en CMS implique une sélection des patients ; ceux ayant trop de problèmes de santé et présentant trop de risques de complications postopératoires sont laissés au réseau public. Également, opérer en CMS implique, certes, des chirurgiens, mais aussi des anesthésistes, des infirmières et des préposés aux bénéficiaires. La grande majorité de ces gens travaillent déjà dans le réseau public ; les recruter en CMS affaiblit encore plus ce même réseau public.

Les CMS sont donc une fausse solution. Bien au-delà de nouvelles salles d’opération, c’est de personnel pour faire fonctionner les salles déjà existantes que nous avons besoin. Déjà en 2017-2018, seulement 30 % des hôpitaux du Québec avaient atteint la cible d’utilisation du bloc opératoire de 85 %2. Des exemples récents démontrent cette même tendance ; des salles d’opération à la fine pointe de la technologie, mais non utilisées, faute de personnel3.

Il importe donc d’augmenter grandement les ressources et les conditions de travail du personnel travaillant déjà aux blocs opératoires de nos établissements publics pour augmenter la capacité opératoire de façon pérenne.

Nous avons les outils pour rendre notre réseau public efficace, notamment en rétablissant des milieux de travail à échelle humaine ainsi que des conditions de travail intéressantes, flexibles et respectueuses du personnel et des patients. C’est en renforçant notre système public de santé que nous parviendrons à améliorer l’accès aux soins, pour tous, dans des délais acceptables. Pas en le privatisant.

1. Lisez l’article « Les cliniques privées gonflent leur marge de profit avec la pandémie » 2. Lisez l’article « Les salles d’opération toujours sous-utilisées » 3. Lisez l’article « Le nouveau bloc opératoire externe de l’hôpital de Jonquière sous-utilisé » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion