Les auteures s’adressent à la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger

Madame la Ministre. Nous vous faisons parvenir cette lettre dans l’ultime espoir d’attirer votre regard sur ce que vivent les popotes roulantes du Québec depuis de trop nombreuses années.

La situation sociodémographique a subi d’importants changements, avec notamment la croissance constante de la population aînée au cours des dernières années, laissant les organismes de maintien à domicile comme les popotes roulantes à bout de souffle, avec peu de ressources et sans financement adéquat. Les récentes années pandémiques n’ont d’ailleurs fait qu’exacerber une situation qui était déjà grandement problématique et nous croyons qu’il devient urgent de s’attaquer à la situation.

Le caractère vital des popotes roulantes au maintien à domicile n’est plus à démontrer. Dans un système de santé surchargé, les popotes roulantes tiennent à bout de bras leur mission de façon quasi miraculeuse et contribuent à prévenir le relogement en CHSLD des personnes aînées en perte d’autonomie, en leur procurant un repas sain et équilibré à la fois, malgré le sous-financement chronique dont elles souffrent.

Par ailleurs, il est crucial de souligner que les popotes roulantes ne sont pas que des services de livraison de repas. Par leur visite régulière, les bénévoles bienveillants et dévoués agissent comme des vigies auprès des personnes aînées, en signalant toute inquiétudes ou anomalies qui pourraient surgir, contribuant à rompre leur isolement et leur solitude.

L’an dernier, les popotes roulantes de la province ont réussi, malgré les embûches, à produire 4,18 millions de repas qui ont été livrés à près de 75 000 personnes aînées en perte d’autonomie, tout en gardant le prix moyen des repas à 6,68 $. C’est ici que l’enjeu du financement devient problématique.

Il est primordial que le prix des repas demeure abordable afin que tous les aînés puissent se nourrir adéquatement. L’urgence est là. Sans financement adéquat, certaines popotes n’ont eu d’autres choix que d’augmenter le prix de leurs repas ou encore de diminuer les portions.

Au bout du compte, c’est toujours la personne aînée qui écope. Avec le coût de la vie qui augmente de façon faramineuse et des revenus qui stagnent, les personnes aînées en perte d’autonomie qui désirent demeurer à la maison en toute dignité ont à choisir entre manger un repas nutritif de qualité ou payer le loyer. Dans une société que l’on veut équitable et qui se targue d’avoir le sort des aînés à cœur, cette choquante réalité est absolument inacceptable.

Madame la Ministre, la solution que nous vous proposons est d’augmenter le financement des popotes roulantes à hauteur de 2,50 $ par repas. Nous vous demandons donc un financement additionnel récurent de 10,45 millions de dollars, directement à la mission, par l’entremise du Programme de soutien aux organismes communautaires. Grâce à cette somme, il deviendra possible de maintenir nos services et d’éviter des fermetures d’organismes telles que celles qui se sont déjà produites l’an dernier, créant un bris de service injuste pour la personne aînée. Ce soutien financier éviterait aussi des refus d’inscription et des listes d’attente au service mettant en péril la sécurité des personnes vulnérables désirant demeurer à la maison.

En terminant, nous aimerions vous faire part de nos réflexions concernant une expression bien québécoise. L’expression « passer en dessous de la table » était utilisée par nos grand-mères lorsqu’elles désiraient appliquer une conséquence aux retardataires qui, l’heure du souper arrivée, brillaient par leur absence. Nos aïeules avertissaient alors leur progéniture qu’ils passeraient en dessous de la table s’ils n’étaient pas présents à l’heure.

Madame la Ministre, les popotes roulantes répondent « présentes » depuis de nombreuses années. Pourtant, il nous semble que la reconnaissance tangible par un financement adéquat tarde à venir. Cette lettre se veut un cri du cœur provenant des 300 popotes roulantes du Québec1 qui n’en peuvent plus de passer en dessous de la table, malgré leur présence quotidienne dans la vie des aînés de nos communautés.

Les popotes roulantes sont bel et bien présentes et elles attendent encore impatiemment l’action de leurs élus.

1. Consultez le site du Regroupement des popotes roulantes Qu’en pensez-vous ? Exprimez votre opinion Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion