Montréal accueille la COP15 visant à adopter le Cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020. Plus de 20 000 personnes participeront à ce rendez-vous international, du jamais vu dans l’histoire de cette Conférence des parties à la Convention sur la biodiversité. La mission principale de cette rencontre internationale est de stimuler les moyens de mise en œuvre nécessaires pour appuyer des mesures urgentes, ambitieuses et transformatrices de la société.

Cela démontre à quel point la communauté internationale se mobilise plus que jamais, afin de mettre un terme et inverser la tendance à l’appauvrissement de la biodiversité pour proposer un cadre qui nous permettra de vivre en harmonie avec la nature.

Les cibles qui sont établies pour 2030 vont dans le sens de protéger les écosystèmes naturels et semi-naturels, d’éviter la fragmentation de ceux-ci, de réduire la pollution de toutes les sources, de diminuer les pressions exercées sur des écosystèmes vulnérables et de faciliter la résilience des milieux vivants face aux impacts des changements climatiques.

Il est également question de protéger des territoires gouvernés ou gérés par les peuples autochtones, en considérant la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et les droits de la personne.

L’idée globale est de nous amener à un changement radical qui puisse nous permettre de comprendre que nous sommes toutes et tous les écosystèmes, les fleuves et les territoires dont nous faisons partie.

Dans le cadre de ces engagements, l’importance de reconnaître le rôle de l’approche des droits de la nature visant à combattre la crise écologique est à l’ordre du jour. En fait, plus de 200 organisations et des individus autour de plus de 40 pays ont demandé l’inclusion dans le texte de l’approche des droits de la nature ou de la Terre-Mère, comme le conçoivent plusieurs Nations autochtones. Cette approche pousse en fait à changer tant le cadre juridique que le rapport à la nature, évitant de continuer avec le statu quo qui facilite le « business as usual ».

Droits de la nature et droits de la personne

Il y a d’ailleurs des propositions concrètes qui cherchent à établir un consensus pour lequel la société civile et quelques États membres demandent un soutien particulier pour leur adoption : celui qui vise à inclure l’importance d’avoir une vision holistique de la nature, afin de combattre cette crise écologique. On retrouve également celle de reconnaître l’approche des droits de la nature, complémentaire à l’approche des droits de la personne, pour mieux répondre aux impératifs d’établir un équilibre entre nos besoins humains et l’équilibre planétaire.

Notons que nous avons déjà le premier cas de reconnaissances des droits à une entité naturelle au Canada. C’est d’ailleurs la Mutehekau shipu ou rivière Magpie, sur la Côte-Nord du Québec, qui s’est vu reconnaître en 2021 une personnalité juridique et des droits. De plus, le fleuve Fraser (Sturgeon) au Canada a aussi été reconnu avec des droits par la Nation Tsilhqot’in. Des lois ont été présentées pour reconnaître ce statut au fleuve Saint-Laurent, tant à l’Assemblée nationale qu’à Ottawa. La rivière des Outaouais est aussi au début des démarches pour obtenir ce statut, ainsi que le lac Winnipeg.

Le Cadre mondial de la biodiversité devrait donc considérer cette approche, qui semble bien combiner tant la vision autochtone qu’allochtone de protection de la nature.

Un autre enjeu très important à surveiller et sur lequel nous espérons que le Canada aura également un rôle de leader, c’est l’inclusion dans plusieurs objectifs qui seront adoptés dans le texte, de l’expression Terre-Mère ou « Mother Earth ». L’inclusion de cette terminologie vient spécifiquement des épistémologies de plusieurs nations autochtones à travers le monde et son inclusion démontrera l’ouverture face à ses perspectives millénaires.

D’ailleurs, dans le cadre de cette COP15, l’Observatoire international des droits de la nature organise, en partenariat avec plusieurs organisations, dont le chapitre de l’ONU « Vivre en harmonie avec la nature », deux panels sur ce sujet : un le 15 décembre à 9 h, ouvert à toute la société civile, dans l’Espace générations vivantes, et un autre le 17 décembre à 9 h au Pavillon du Canada (zone bleue). Dans ces panels, les voix des rivières et des éléments naturels qui se sont vu accorder une personnalité juridique ou qui sont en chemin vers cette reconnaissance seront présentées. C’est le cas du fleuve Saint-Laurent, fleuve hôte qui sera en dialogue avec la rivière Magpie/Mutehekau shipu, El Mar Menor en Espagne, la rivière Odra en Pologne et le fleuve Atrato en Colombie.

En bref, le Canada jouera un rôle prépondérant dans les négociations, car il devra assurer le leadership et l’ambition des moyens à prendre face à la perte massive de biodiversité, dont nous sommes à la base responsable comme humanité. Nous espérons sincèrement que le Cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020 sera effectivement ambitieux et ouvert face à ces nouvelles perspectives.

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