Depuis quelques années, de plus en plus d’organisations québécoises ont eu la fausse bonne idée d’implanter l’approche EDI (équité, diversité, inclusion) dans le cadre de leur démarche de développement durable, même s’il s’agit d’une importation culturelle américaine qui n’a fait l’objet d’aucun ajustement au contexte distinct du Québec.

Parmi les dérives qui en découlent, nous avons tous encore en tête ces employés et collaborateurs des Francos de Montréal qui ont dénoncé l’été dernier de graves atteintes à leur droit de travailler en français au Québec. Leur employeur s’est alors défendu en invoquant la « diversité et l’inclusion », bien que le français soit l’unique langue officielle du Québec ainsi que la langue normale et habituelle du travail.

Comme je l’expliquais dans mon dernier texte⁠1, l’application de l’approche EDI au Québec pose d’innombrables problèmes, car elle génère une forte négation de notre modèle québécois de vivre ensemble universaliste. Pour éviter ces dérives, qui sont vouées à se multiplier, il devient nécessaire de définir une nouvelle approche à incidence sociale résolument québécoise qui pourrait s’intégrer aux démarches de développement durable de nos organisations, tout en demeurant en adéquation avec nos valeurs, notre histoire et notre culture.

Cette nouvelle approche devra regrouper des principes phares qui nous rassemblent, et non qui nous divisent, et elle devra favoriser l’expression de la diversité sous toutes ses formes au sein de la nation québécoise, et non en sa périphérie.

Ces principes phares pourraient regrouper l’égalité, le français comme langue commune, ainsi que l’intégration bienveillante à la culture québécoise.

L’égalité pourrait être le premier de ces principes. L’égalité consiste à traiter chacun également sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la « race », le sexe, la religion, etc. L’égalité est le pendant naturel d’une société universaliste comme la nôtre, c’est-à-dire une société qui fédère tous les membres de sa nation autour de valeurs politiques communes pour les traiter uniquement en citoyens, et non pas en membres de communautés d’appartenances particulières. Pour cela, les organisations devraient garantir des interactions organisationnelles dissociées de toute appartenance identitaire particulière.

Vecteurs d’intégration

Le français comme langue commune pourrait être le deuxième de ces principes. Le français comme langue commune consiste notamment à reconnaître le français comme l’unique langue officielle du Québec ainsi que la langue normale et habituelle du travail. Pour cela, les organisations devraient non seulement respecter la loi 101, mais aussi contribuer à la protection et à la promotion de la langue française. Il serait par exemple possible pour elles d’offrir des cours de francisation pour leurs employés ne maîtrisant pas adéquatement notre langue commune, ce qui serait particulièrement à propos pour les entreprises qui tentent de justifier l’absence de services en français par la pénurie de main-d’œuvre ; nos entreprises peuvent être de puissants vecteurs d’intégration à notre langue commune. Ainsi, les campagnes de peur ou d’indifférence autour du français doivent cesser, puisque la langue française n’est pas un frein au développement de nos entreprises, mais plutôt une importante source de créativité et d’occasions économiques, ainsi qu’une contribution essentielle à la diversité culturelle internationale.

L’intégration bienveillante à la culture québécoise pourrait être le troisième de ces principes.

L’intégration bienveillante à la culture québécoise consiste à promouvoir notre culture commune et à favoriser la convergence des traditions culturelles des néo-Québécois autour de celle-ci.

Pour cela, les organisations devraient promouvoir la culture québécoise en filigrane de leurs activités courantes, par exemple en offrant des produits culturels québécois parmi les incitatifs, les bonis ou les activités sociales. Ces actions auraient non seulement l’avantage d’appuyer l’industrie culturelle québécoise, mais elles permettraient aussi aux Québécois issus de l’immigration de s’approprier la culture québécoise et ses références, au même titre que les Québécois non issus de l’immigration. En effet, je conçois mal que l’on puisse encourager la mise à l’écart perpétuelle des immigrants de notre culture commune, comme le prône le multiculturalisme canadien.

En somme, la société québécoise est l’une des plus accueillantes au monde, et pour conserver une réelle cohésion sociale dans un monde qui évolue aussi rapidement, nos entreprises privées et nos institutions publiques ont leur rôle à jouer. Toutefois, s’appuyer sur des solutions inadaptées issues des États-Unis ou du reste du Canada, comme l’approche EDI, s’avère contre-productif et parfois dommageable, puisqu’elles mènent à une ambiance de dissonance cognitive, où la réalité présentée en formation et la réalité concrète s’opposent, où l’adhésion à certaines visions du monde devient obligatoire, où plusieurs disent le nécessaire pour conserver une aura de respectabilité factice sans jamais vraiment y croire, où l’hypocrisie foisonne.

C’est pourquoi nos organisations doivent délaisser l’approche EDI au profit d’une approche résolument québécoise, qui regroupe des principes phares qui nous rassemblent, et qui permet l’expression de la diversité sous toutes ses formes au sein de la nation québécoise. La cohésion sociale est trop précieuse pour ne pas en faire une priorité.

1. Lisez « Équité, diversité et inclusion : l’enfer est pavé de bonnes intentions » Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion