Une vingtaine d’heures, voilà en moyenne le temps total qui sera consacré par l’école québécoise à la formation en éducation économique sur la consommation d’un élève au long de son parcours primaire et secondaire.

Avouons que c’est bien peu pour permettre au futur adulte de comprendre les CELI, CPG, CRI, FCP, FNB, IPC, REER, REEE, Relevé 1, RVER, T4, TPS, TVQ et autres — sans parler des plus de 440 autres notions des « principaux termes du monde financier » que contient le glossaire destiné au grand public de l’Autorité des marchés financiers. Nous n’avons même pas encore touché à l’usage approprié d’une carte de crédit, à l’achat ou à la location d’un véhicule automobile, au bail de location résidentiel, à l’accès à la propriété, ni au monde de l’assurance.

Pourquoi est-ce un enjeu si important ?

Avant l’âge de 25 ans, beaucoup de jeunes auront déjà pris des dizaines de décisions financières susceptibles d’avoir un impact majeur sur le cours du reste de leur vie. Malheureusement, trop d’entre eux manquent d’outils et de connaissances pour faire des choix éclairés et responsables.

Au Québec, en partie en raison de nos racines chrétiennes, on a toujours eu de la difficulté à se parler d’argent. Symptôme probable de ce phénomène historique et du manque d’attention portée par l’école au sujet, 328 000 Québécois se sont retrouvés en situation d’insolvabilité au cours des 10 dernières années.

En moyenne au cours de la dernière décennie, près du tiers des dossiers d’insolvabilité au pays touchaient des Québécois (32,1 %), alors que notre poids démographique était en moyenne de 22,8 % pour la même période.

Les coûts sociaux qui en découlent sont majeurs et déplorables, tant pour les personnes et familles touchées que pour la société québécoise. Un seuil plus élevé de littératie financière ne réglera pas à lui seul cet enjeu, mais il fera une différence tangible.

Deux pistes de solutions

À l’heure où le ministère de l’Éducation du Québec réfléchit à « l’actualisation des programmes de formation », le temps est venu d’avoir une réflexion sérieuse face aux enjeux majeurs de littératie financière dont souffre le Québec. Surtout, il est temps de prendre conscience que la littératie financière n’est pas qu’une affaire de riche.

Tous les parents n’ont pas les outils et les connaissances nécessaires pour aborder ce sujet adéquatement à la maison. C’est à l’école québécoise que revient d’emblée cette responsabilité cruciale.

D’ailleurs, une des valeurs importantes qui nous unissent comme Québécois est cet idéal d’égalité des chances. Or, l’accès à une compréhension adéquate des dynamiques de consommation et de la gestion financière est indissociable de cet idéal.

Au-delà de prioriser l’éducation financière et d’y accorder plus d’importance que l’équivalent de quelques jours de formation d’un cours d’univers social en cinquième secondaire, force est d’admettre qu’un travail de marketing s’impose pour rendre plus attrayant et accessible l’univers des services financiers et de la fiscalité. Ce n’est pas avec une liste interminable de sigles indigestes qu’on parviendra à rivaliser contre l’attrait des aventures spéculatives que proposent les cryptomonnaies et les mêmes stocks, qui constituent trop souvent une porte d’entrée malheureuse de la nouvelle génération dans le secteur financier.

Nos gouvernements et les entreprises du secteur financier doivent impérativement relever ce défi, surtout au moment où l’offre de produits financiers se complexifie considérablement. Le resserrement des seuils de mise de fonds pour un prêt hypothécaire ou la hausse du paiement mensuel minimum sur un solde de carte de crédit sont de timides pas dans la bonne direction, mais ces mesures pertinentes n’augmentent en rien le niveau de littératie financière de la population. L’apprendre à l’école, ce n’est pas secondaire.

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