Au début de l’été, La Presse a publié un palmarès des belles terrasses de Montréal.

L’une d’elles, celle du restaurant h3, est située dans le complexe Humaniti, qui compte quelque 500 appartements et où nous habitons, ma femme et moi, juste de l’autre côté de la cour. Le bruit qui émane de ses enceintes quand elles crachent leur musique de danse nous insupporte, comme il hérisse de nombreux voisins.

Lisez « Les terrasses à visiter cet été »

Quand la terrasse a rouvert en mai, il nous semblait vivre à côté d’une discothèque. L’après-midi, nous avions beau fermer portes et fenêtres, nous entendions sans arrêt le « boum boom » assourdissant des notes graves. Et le soir, même si nous mettions des casques d’écoute pour regarder la télé, des notes inattendues se mêlaient à la trame sonore des séries.

L’Administration avait pourtant promis que le son de la terrasse ne dérangerait pas les riverains.

Les plaintes ont été nombreuses. Je connais un couple qui n’a pas renouvelé son bail et une dame qui a demandé à résilier le sien, à cause du ramdam de la terrasse. Pour ma part, j’ai multiplié les courriels de plaintes.

La terrasse, il est vrai, compte quelques défenseurs. « Si tu veux un endroit quiet tu as juste à ne pas venir vivre au centre-ville », m’a lancé un voisin. Avec un âgisme décomplexé, un autre a conseillé aux mécontents d’aller vivre dans un centre pour personnes âgées.

On vante beaucoup en ce moment, et avec raison, les mérites de la densification. C’est un mode de vie écologique. On peut tout faire à pied : accéder à la plupart des services, tout en jouissant d’une vie culturelle riche.

Mais encore faut-il que les quartiers, y compris ceux du centre-ville, soient d’agréables milieux de vie, sans nuisances sonores intolérables, et accueillants pour des gens de tous les âges.

À force de discussions, les protestataires ont arraché de petits compromis. Le volume de la musique, qui commençait dès 11 h et se prolongeait jusqu’à 23 h, a été réduit en début de journée. Les haut-parleurs ont été repositionnés pour ne plus être dirigés vers les appartements. Enfin, on a demandé aux disc jockeys de ne pas dépasser les 80 décibels.

Est-ce suffisant ? Les jours sans animateur, oui ! Quand les animateurs sévissent, en revanche, la cohabitation provoque encore de fausses notes. Quatre-vingts décibels, la limite apparemment permise par les règlements municipaux, ce n’est peut-être pas assez pour appeler la police, mais largement suffisant pour horripiler. D’autant que je soupçonne les disc jockeys, dans l’enthousiasme, de l’enfreindre allégrement.

Ces jours-là, il nous arrive de songer à déménager. C’est d’autant plus tentant qu’il est sans doute possible d’obtenir la résiliation du bail. Selon le Tribunal du logement, en effet, les propriétaires doivent assurer « la jouissance paisible des lieux ». On en est loin. Cette terrasse, comme bien d’autres, n’est pas gérée comme si elle était dans un milieu résidentiel.

En attendant, il m’est venu un amour de la pluie, inédit en 77 ans. Il m’arrive même de consulter la météo en espérant y voir apparaître l’icône avec des nuages et des gouttes d’eau. Je ne me reconnais plus. C’est pourtant simple : quand les nuages crèvent, la terrasse ferme. Et quand elle est close, pas d’animateur. La sainte paix !

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