La guerre déclenchée en Ukraine par le président russe, Vladimir Poutine, a des effets catastrophiques sur la population ukrainienne : des millions de familles ont dû fuir ou tentent de survivre, des milliers de personnes sont mortes, des villes entières sont détruites, leur patrimoine historique et culturel aussi. Une dévastation à grande échelle. Même la population russe souffre des agissements de son nouveau tsar, son pouvoir démocratique ayant été mis à mal. Grâce à une propagande insidieuse du gouvernement, la grande majorité de la population russe appuie son président. Mais cette guerre est aussi en voie d’affecter une partie non négligeable de la population mondiale.

Une crise alimentaire de première grandeur se profile à l’horizon. Elle touchera les populations les plus vulnérables de la planète, notamment en Afrique. Le Programme alimentaire mondial (PAM) n’a plus accès à ses sources d’approvisionnement habituelles en Ukraine et en Russie. Avec le départ de millions d’Ukrainiens, il n’est pas certain que le pays puisse procéder aux récoltes habituelles, limitant encore plus l’accès à la nourriture. Les silos à grains sont pleins des récoltes précédentes mais les ports du sud de l’Ukraine sont bloqués par la guerre. Il en résulte une flambée des prix des aliments, en particulier dans les pays dépendant des importations en provenance de l’Ukraine, ce qui peut provoquer le chaos social et économique.

Plus de 100 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de famine ou de faim aigüe en 2022, du jamais-vu sur la planète. L’alimentation représente déjà en moyenne plus de 40 % des dépenses des familles en Afrique subsaharienne.

Le président du Sénégal, Macky Sall, représentant aussi l’Union africaine, s’est même déplacé à Moscou pour plaider la cause des populations africaines qui souffrent des effets de cette guerre, mais sans succès.

L’économie mondiale est durement touchée et le risque d’une récession mondiale, couplée à l’inflation, se rapproche à grands pas. Cette situation fort dangereuse pour les familles à bas et moyens revenus de nos pays est nourrie par l’envolée des prix du pétrole ainsi que par l’augmentation des prix des aliments. Même la transition énergétique se trouve ralentie par le soudain accroissement de l’utilisation du charbon en remplacement du pétrole russe.

À la sortie de deux ans de crise COVID-19, le monde commençait à reprendre espoir. Divers gouvernements de la planète, encouragés par leur population, reprenaient leurs bâtons de pèlerins, pour poursuivre les engagements pris à Paris en 2015 afin de limiter l’augmentation des gaz à effet de serre, ainsi que ceux pris à l’ONU la même année pour atteindre les objectifs de l’Agenda 2030 de lutte à la pauvreté et aux inégalités. Et puis VLAN ! Poutine attaque !

Le Secrétaire général des Nations unies nous avertit maintenant froidement des conséquences majeures de cette guerre. « L’impact de la guerre sur la sécurité alimentaire, l’énergie et les finances est systémique, grave et s’accélère. Pour les populations du monde entier, la guerre menace de déclencher une vague sans précédent de faim et de misère, laissant dans son sillage le chaos social et économique. »

Il est immoral de bloquer l’accès à la nourriture aux populations les plus vulnérables et même d’en faire un enjeu de négociation. Face à cette situation catastrophique, le Canada et ses partenaires internationaux ne doivent ménager aucun effort pour amener la Russie et l’Ukraine à rouvrir les ports céréaliers de le la mer Noire.

Parallèlement et sans tarder, nous devons faire l’inventaire de nos réserves de céréales pour déterminer ce qui peut être redirigé vers les pays qui seront frappés par la famine faute de l’approvisionnement ukrainien et russe.

Déjà le PAM se voit dans l’obligation de diminuer la nourriture distribuée à certaines populations à risque pour l’envoyer vers d’autres populations qui souffrent encore plus de la faim. Cette situation est absolument inacceptable, honteuse et inhumaine.

L’Europe a décidé de lancer un boycottage des produits russes et d’arrêter d’importer du pétrole russe. La communauté internationale a mis en place des sanctions économiques qui mettent beaucoup de pression sur le gouvernement russe et sur les oligarques qui le soutiennent. Des enquêtes sont en cours et d’autres sont à venir pour amener les responsables de crimes de guerre devant la justice. Il faut éviter que ce modèle de comportement guerrier se répande chez d’autres dirigeants archaïques. En tant que membres de la société civile nationale et internationale, nous appelons notre gouvernement à garder le cap et à encourager ses partenaires de la communauté internationale à accroître les pressions pour mettre fin au conflit. On doit tout faire pour arrêter cette folie.

* Le GREDIC est formé d’anciens dirigeants d’organismes de coopération internationale : Robert Letendre, Nigel Martin, Mario Renaud, Nicole St-Martin et Pierre Véronneau. Il est associé à l’Observatoire des crises et de l’aide humanitaire (OCCAH) de l’UQAM.

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