En cette période d’anniversaire du père de la loi 101 et de sa révolution linguistique, je me permets de relater une autre révolution innovante peu connue de la société québécoise. Tous se souviennent du « printemps érable de 2012 » et des manifestations pour le gel des frais de scolarité, mais personne ne se souvient de la révolution pro-étudiante ou le printemps étudiant de Camille Laurin, en 1982, 30 ans plus tôt. Rappelons les grandes lignes de ce chambardement historique.

À titre de ministre de l’Éducation, Camille Laurin changea à tout jamais les rapports de force au sein de nos établissements d’enseignement. À l’époque, les étudiants étaient pris en otages par des grèves à répétition ou par des décisions arbitraires, autant de la part de groupuscules d’extrême gauche que des syndicats d’enseignants ou des directions de cégep et d’université, qui niaient année après année la représentativité des associations étudiantes. Cette révolution pro-étudiante a permis la reconnaissance dans une loi (la loi 32) de la démocratie étudiante, ainsi qu’un statut officiel des associations étudiantes dans les universités et les cégeps, tout en assurant un financement à la source (cotisation automatique-non-obligatoire), mais aussi, la représentation dans les instances décisionnelles des établissements postsecondaires au Québec.

Sans cette révolution, les associations étudiantes auraient-elles pu mobiliser autant d’étudiants sur une aussi longue période lors du « printemps érable » de 2012 ? Je n’ai pas de réponse, mais la stabilité financière et démocratique des associations étudiantes fut une clé de leur succès de mobilisation.

Bien sûr, la loi 32 sur l’accréditation et le financement des associations étudiantes n’est pas parfaite. À l’époque, à titre de secrétaire général du Regroupement des associations étudiantes universitaires du Québec (RAEU), j’aurais voulu que cette loi encadre davantage le droit de grève des étudiants avec un quorum minimal, que nous puissions évaluer les professeurs et que cette évaluation soit rendue publique, que soit reconnue l’implication des étudiants dans leur milieu de vie par la reconnaissance de crédits à la participation, que les stages étudiants soient rémunérés. Tout cela, encadré par un Centre étudiant de services communautaires (CESC) et la mise en place d’un service communautaire (service civil) non obligatoire qui aurait été fort utile, soit dit en passant, durant les deux premières années de la pandémie de la COVID-19.

J’espère que l’autre loi 32 pour « protéger la liberté académique universitaire » qui vient d’être déposée par la ministre de l’Enseignement supérieur sera adoptée afin d’éviter que des groupuscules terrorisent et infiltrent, comme à mon époque, les associations étudiantes, prenant ainsi en otages les étudiants par des tactiques d’intimidation, comme ce fut le cas dernièrement pour l’Association étudiante de sciences politiques de l’UQAM.

Je remercie Camille Laurin, qui a su résister en 1982 aux lobbys d’opposition des syndicats d’enseignants et des administrations de cégeps et d’universités, des groupuscules d’extrême gauche qui contrôlaient l’Association nationale des étudiants du Québec (ANEQ) et du Parti libéral de l’époque. Ce visionnaire de la loi 101 a permis également aux associations étudiantes de devenir depuis 40 ans des partenaires incontournables dans nos établissements d’enseignement. Un grand pas pour la démocratie étudiante et le processus démocratique, garant de nos droits individuels et collectifs. Je n’ai jamais été aussi fier d’être québécois ! À méditer en souvenir d’un visionnaire qui a redonné la fierté aux Québécois en tant que nation !

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