Alors que le monde a les yeux rivés sur l’invasion sauvage et non provoquée de l’Ukraine par la Russie, conflit qui ramène l’Europe aux pires heures du XXe siècle, une autre région voit des changements géopolitiques majeurs, créant une ouverture inimaginable il n’y a pas si longtemps pour une paix durable dans l’ensemble de cette partie du monde.

Les 27 et 28 mars derniers se tenait en Israël le Sommet du Néguev, auquel ont participé les ministres des Affaires étrangères de l’État d’Israël, de l’Égypte, des Émirats arabes unis, du Maroc, de Bahreïn ainsi que le secrétaire d’État des États-Unis. Ce sommet n’aurait pu avoir lieu sans l’accord tacite de cet autre géant du monde arabe : l’Arabie saoudite, qui ajoute au Sommet son importance et sa signification. Ces développements importants sont le fruit des Accords d’Abraham, signés en 2020.

Ce sommet survient quelques jours à peine après la rencontre entre le premier ministre israélien Naftali Bennett, le président égyptien Al-Sissi et le prince héritier des Émirats arabes unis Mohammed ben Zayed, à Sharm el Sheikh, en Égypte.

Sde Boker : un symbole puissant de l’acceptation d’Israël

Le Sommet a eu lieu à Sde Boker, un village qui n’est connu que pour son association avec le fondateur de l’État d’Israël, David Ben Gourion. Le symbole est puissant. Comment ne pas voir dans ce sommet tenu, à cet endroit spécifique, un hommage appuyé par des acteurs centraux du monde arabe à l’homme qui, plus que tout autre, est responsable de la renaissance de l’État juif dans les terres ancestrales de son peuple ? La paix ne peut s’envisager que lorsque chacun reconnaît l’existence de l’autre et Israël n’a eu de cesse de demander à ses voisins d’acter la réalité de sa présence.

Cette rencontre, à laquelle ont participé les ministres des Affaires étrangères de quatre importants pays arabes, est un indice de plus d’un réalignement important des forces au Moyen-Orient. Le verrou palestinien – qui pendant plus de 70 ans a empêché tout progrès – a sauté. Le monde arabe a cessé de donner aux leaders palestiniens le veto qu’ils s’étaient auto-accordé pendant des années sur tout développement vers la paix.

L’acceptation de cette nouvelle réalité est soulignée par la présence du secrétaire d’État américain, Antony Blinken. Les Accords d’Abraham, qui étaient vus comme une « patente de Trump », font maintenant partie de la stratégie géopolitique américaine et sont appuyés tant par les démocrates que par les républicains.

Le problème israélo-palestinien n’a pas disparu – et ce serait une erreur de le considérer ainsi –, mais il ne peut plus déterminer à lui seul le rapport des forces dans la région et la théorie, sans cesse ressassée, voulant que seule sa résolution puisse apporter la paix au Moyen-Orient a échoué.

Cette nouvelle dynamique peut cependant permettre aux Palestiniens de saisir la chance d’établir une vraie paix avec les Israéliens sur un modèle qui instaure le dialogue entre les peuples.

Ce sommet illustre aussi la confirmation d’un certain retrait américain de la région alors que l’Iran affiche sa puissance, confirme ses velléités hégémoniques, et est probablement sur le point de devenir une puissance nucléaire.

Israël au centre de la diplomatie mondiale

Cette intense activité diplomatique régionale doit aussi être vue dans un contexte plus mondial, marqué par l’agression russe en Ukraine.

Le premier ministre israélien est le premier dirigeant mondial à avoir rencontré Poutine après le début des hostilités, ce qu’il avait fait en coordination avec la France, l’Allemagne et les États-Unis. Le président ukrainien Zelensky a ouvertement demandé à Bennett de continuer ses efforts de médiation.

Alors qu’un petit – mais très vocal – groupe d’activistes anti-Israël continuent leurs efforts de délégitimation de l’État juif, s’appuyant sur des ONG au programme très partial contre Israël, les dirigeants du monde entier sont très conscients que ce petit pays a un rôle important à jouer sur la scène mondiale. C’est la raison pour laquelle les tentatives de l’isoler échouent les unes après les autres.

Ces liens judéo-arabes, au lieu d’être considérés comme dommageables à la situation des Palestiniens et à leur désir – très légitime – d’avoir leur État, devraient servir de levier pour amener la solution de deux États pour deux peuples, seule voie d’avenir juste pour ces deux nations.

Le Canada doit prendre le virage du Moyen-Orient du XXIe siècle

Le Sommet du Néguev, comme l’activité diplomatique intense qui l’a précédé, signale une acceptation véritable de la légitimité de l’État juif dans la région.

De toute évidence, les plaques tectoniques bougent au Moyen-Orient. Et le Canada doit en prendre acte, s’y investir activement et y jouer un rôle. Non seulement par principe afin d’appuyer ce mouvement vers la paix, mais aussi pour y protéger et développer ses intérêts, notamment économiques. C’est dans notre intérêt à tous.

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