L’auteur s’adresse au maire de Québec, Bruno Marchand

Je suis entrepreneur en construction et en immobilier depuis près de 30 ans dans la grande région de Québec. En tant que citoyen, j’ai l’impression que le plus gros projet de société de ma ville a été décidé en coulisse sur le coin d’une table sans légitimité démocratique.

Deux maires plus tard, aucune consultation populaire n’est prévue, et le pourcentage d’adhésion au projet semble fondre au rythme qu’on le dévoile au public. Ce qui devait être un projet de société pour l’ensemble de l’agglomération de la capitale nationale est devenu un projet idéologique pour une tranche de citoyens d’un secteur de la ville.

La semaine dernière, j’ai eu la malheureuse impression d’entendre votre prédécesseur à travers vos mots. Comme si, soudainement, vous aviez hérité de son arrogance et de son entêtement à ne pas être à l’écoute de sa population. Rassurez-moi !

À une époque dans laquelle le sarcasme pour la politique est à son comble – les mots liberté et démocratie ont été amplement galvaudés et employés à toutes les sauces –, la population de Québec va assister à une transformation majeure de son milieu de vie sans pouvoir se prononcer.

Ce qui constitue le plus gros projet d’infrastructure de transport en commun de l’histoire contemporaine de la capitale nationale ne suscite aucun enthousiasme auprès de la majorité de ses citoyens. C’est quand même étrange, non ?

Plus étrange encore, selon moi, c’est de constater que l’acceptabilité sociale, l’opinion des experts, le rapport du BAPE, l’inquiétude des citoyens et des commerçants… rien ne semble influencer les décisions de votre administration. Au nom de l’environnement, le projet verra le jour coûte que coûte, contre vents et marées.

L’environnement ?

Excusez ma naïveté, mais j’ai du mal à comprendre en quoi couper tous les arbres centenaires, enlever les bandes de gazon en façade des immeubles, couler un canal de béton sous une toile de fils électriques et provoquer des bouchons de circulation dans les artères avoisinantes constitue un projet durable et écologique.

L’obsession de réduire la circulation automobile semble avoir préséance sur la logique et le bon sens. Au grand plaisir de certains, en enlevant des voies de circulation et des stationnements en parallèle le long du tracé du tramway, la circulation sera diminuée. Elle sera même souvent complètement paralysée par les camions de livraison pour les commerces ou les résidences ; les ambulances, les pompiers et policiers ; les travaux de rénovation ou la construction d’immeubles ; l’entretien et le déneigement des rues et des trottoirs, etc.

Petite parenthèse sur une belle contradiction concernant cette idéologie : on parle de densification et de diminution automobile, mais aucun permis pour la création de nouveaux logements résidentiels ne peut être octroyé sans stationnements. La conversion et la rénovation de vieux immeubles deviennent presque impossibles sans condition d’ajouter des places de stationnement.

Lorsque Jean Drapeau, alors maire de Montréal, a permis la réalisation du métro, la population de Montréal était à peine plus grande que celle de Québec aujourd’hui. Pour cette grande réalisation, parce qu’il a su rassembler la population autour de ce projet et obtenir une légitimité populaire, son nom restera gravé à jamais dans la mémoire collective. Aujourd’hui, on ne saurait imaginer Montréal sans ce transport en commun efficace et respectueux de l’environnement et de ses citoyens.

Vous avez aujourd’hui la même possibilité de réaliser un grand projet collectif. Ce qui vous manque, c’est l’appui de la majorité de la population.

Qu’est-ce que vous attendez pour réaliser un grand projet collectif pour Québec à l’échelle du métro de Montréal ? Pourquoi refuser d’obtenir une légitimité sociale ? Pourquoi ne pas faire preuve d’ouverture pour d’autres options ? Pourquoi ne pas opter pour l’attrait envers la mobilité collective plutôt que la contrainte ? Le consensus plutôt que l’idéologie ? Enfin…

Monsieur le Maire, vous avez la possibilité de faire les choses dans l’ordre et, surtout, dans le respect de la majorité de votre population. N’oubliez pas que vous n’êtes pas le maire d’une petite municipalité, mais bien celui de la capitale nationale.

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