Au Québec, le régime d’assurance maladie universel ne couvre que quelques actes dentaires pour certains groupes très précis et limités de la population.

Récemment, des opinions exprimées dans l’espace médiatique ont mis au jour ce manque d’accès aux soins et les solutions originales qui permettent de contourner cette barrière.

Lisez la chronique de Mario Girard, « Des factures qui font mal » Lisez la chronique de Mario Girard, « Des factures qui font mal (2) »

Or, il n’est pas seulement question d’un beau sourire. En tant que résident en médecine dentaire, je suis témoin de situations où des patients pour qui les soins dentaires sont un préalable à des soins médicaux essentiels se voient ajouter le fardeau financier de payer ces soins.

C’est le cas de patients pour qui une greffe d’organe est imminente (rein, cœur, foie, etc.) ou qui requièrent une opération valvulaire cardiaque. La littérature médicale est claire à ce sujet : les soins dentaires préalables minimisent les complications associées aux problèmes infectieux. Il ne s’agit pas d’un risque théorique.

L’examen dentaire en milieu hospitalier est pris en charge par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Or si cet examen révèle la nécessité de soins dentaires avant l’opération, les frais de ces soins doivent être assumés par le patient, à moins que ce dernier ne soit couvert par le programme d’aide sociale.

Pour le patient sans assurance qui est dans l’incapacité de payer immédiatement ces soins pourtant requis par son état, le dilemme est important. Il ajoute au fardeau de la maladie le stress de faire des choix budgétaires déchirants ou de recourir aux proches ou au sociofinancement. Pour les cliniciens, il implique l’obligation de monter un dossier pour chaque cas, faire des démarches afin d’avoir accès à des sources de financement non récurrentes, limitées et exceptionnelles. D’ailleurs, les efforts déployés par ces cliniciens sont salués à cet égard. Mais cette solution est inconstante, incertaine et non viable à long terme.

Devant cette situation difficile et ce niveau de soins à deux vitesses, certains patients repoussent leur opération avec toutes les conséquences que cela implique sur leur santé et leur qualité de vie. Bref, des enjeux d’équité et d’utilisation des ressources sont soulevés.

Ultimement, il s’agit d’offrir tous les soins jugés indispensables et requis par l’état de santé du patient, sans égard à sa capacité de payer. N’est-ce pas là l’essence même du système d’assurance maladie universel qui nous distingue de tant d’autres États ?

L’incapacité de payer est-elle si fréquente ? Malheureusement, oui. C’est un constat que Louise Leduc rapporte dans son article intitulé « Quand les plus démunis s’en remettent à la charité ».

Lisez le texte de Louise Leduc

Le statu quo a un coût. Nous savons que dans plusieurs situations, une intervention dentaire au moment opportun permettrait d’éviter des complications infectieuses graves post-opératoires qui devront être prises en charge par le système de santé. Ces complications engagent les services de bon nombre d’équipes de spécialistes, prolongent la durée de l’hospitalisation et entraînent des coûts financiers importants, sans compter le préjudice causé au patient.

Au Québec, aucune étude n’a été effectuée pour bien documenter le phénomène, il s’agirait d’une étape préalable à toute décision de financement global.

Dans un système de santé à la recherche d’optimisation, ne devrait-on pas explorer des solutions de rechange moins onéreuses permettant d’augmenter la qualité de vie des patients ?

Ouvrons la discussion sur la couverture des soins dentaires urgents médicalement requis. Dans un système de soins universel, il est grand temps d’examiner la situation dans son ensemble.

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