Parler du privé en santé, c’est encourir automatiquement l’excommunication par certaines églises. On n’enfreint pas impunément un dogme ! D’aucuns se scandalisent que l’on fasse du profit sur le dos des malades. Le vrai scandale est que, selon les plus récentes statistiques, 160 000 personnes attendent une chirurgie. Elles étaient 115 000 avant la pandémie. Des gens souffrent et parfois meurent faute d’avoir reçu des soins à temps. C’est intolérable !

La qualité des soins au Québec est bonne, très bonne même, mais l’accessibilité est lamentable. La machine est incapable de répondre à la demande. Depuis 30 ans, tous les gouvernements ont promis de régler le problème. Résultat : la situation ne fait qu’empirer. L’accessibilité risque de se détériorer encore davantage avec le vieillissement de la population. Entre 2020 et 2029, 520 000 personnes s’ajouteront aux 65 ans et plus !

Lorsque l’on parle de privé en santé, plusieurs pensent au système américain dont les coûts sont exorbitants et qui laisse sans soins une partie de la population. Ce n’est pas la voie à emprunter. Il faut plutôt regarder du côté de l’Europe. En France, plus de 1000 hôpitaux sur 3000 sont de propriété privée à but lucratif. Ceux-ci assurent 50 % des hospitalisations et 65 % des chirurgies ambulatoires. Ces organisations sont sous contrat avec l’État, et le patient ne débourse rien.

Faut-il emprunter à ce modèle ? Disons simplement que la France est réputée avoir un des meilleurs systèmes de santé sur la planète ! D’autres pays, plutôt sociaux-démocrates, comme l’Allemagne, le Danemark, l’Espagne ont des approches semblables. Tous ces pays ont su additionner les forces du public et du privé.

Notre système public compte sur des ressources très compétentes et dédiées. Le financement par l’État garantit aussi sa pérennité. Mais l’État a l’agilité d’un mammouth.

À titre d’exemple, sur le plan technologique, l’utilisation encore récente des télécopieurs comme principal outil de communication est un symbole de l’inertie de ce réseau.

Le mode de financement est aussi vicié. Le budget annuel est basé sur celui de l’année antérieure avec l’indexation de quelques paramètres et non sur un volume d’activités, sauf quelques exceptions. Avec le résultat que moins on traite de patients, mieux se portent les finances… Pourtant, depuis plusieurs années, le ministère de la Santé et des Services sociaux nous dit faire des études pour établir un coût par activité et changer le modèle de financement. Mais ça tarde. Peut-être finalement que l’on craint dans les hautes sphères gouvernementales qu’en passant à un financement selon le volume d’activités, plusieurs établissements fassent preuve de dynamisme et poussent la facture à la hausse…

Depuis le début de la pandémie, le privé a réalisé 85 000 chirurgies. Que serait-il arrivé sans son apport ? Pourtant, rien ne le préparait à une telle demande.

C’est la force du privé de pouvoir s’ajuster rapidement aux imprévus. Celui-ci est moins tributaire de la rigidité des conventions collectives. Les décisions ne sont pas soumises à de multiples paliers hiérarchiques et aux contingences politiques.

Certains diront qu’avec une plus grande place faite au privé, on risque de vider le secteur public de ses ressources. Si c’était éventuellement le cas, les syndicats et la partie patronale devraient se questionner, notamment, à savoir s’ils ont négocié les bonnes choses. Et quel serait le mal à ce que tant le personnel que les patients aient un certain choix ? La concurrence force à être meilleur.

Alors qu’elle était ministre de la Santé et des Services sociaux, Pauline Marois avait autorisé le traitement de patients atteints du cancer dans des hôpitaux américains, parce que notre système n’arrivait pas à le faire dans des délais raisonnables. Naturellement, elle avait été très critiquée. C’était tout à son honneur d’avoir eu le courage de prendre non pas le parti du système, mais celui du patient !

M. Legault, M. Dubé, les Québécois s’attendent aussi à ce que vous preniez le parti du patient !

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