Le projet du REM de l’Est répond au besoin évident d’un réseau de transports en commun structurant pour l’Est de Montréal. L’implantation de certains tronçons en tracé aérien a toutefois été présentée comme conditionnelle à la réussite du projet par le promoteur, CDPQ-Infra.

Alors qu’un comité d’experts se penche actuellement sur les enjeux d’intégration urbaine, incluant la structure aérienne de certains tronçons, il est essentiel de rappeler l’importance d’évaluer de façon diligente et approfondie l’option d’un tracé souterrain étendu, qui permettrait d’éviter des impacts sociaux et urbains dévastateurs pour certaines des zones touchées.

Bien que les difficultés liées à un tracé souterrain aient été maintes fois énoncées, tous les aspects du projet se doivent d’être considérés. Un réseau de transport structurant, lorsque planifié en collaboration avec les communautés locales, a le potentiel de soutenir un développement concerté du secteur et d’améliorer la qualité de vie de la population résidente. Néanmoins, un tracé aérien peut avoir des conséquences importantes sur les quartiers touchés, qui se retrouvent scindés par une structure imposante.

Malgré tous les efforts du promoteur, les nuisances visuelles et sonores s’annoncent également considérables. Ces effets néfastes sont d’ailleurs amplifiés dans les milieux denses, où la distance entre les façades est plus courte.

Ces mêmes préoccupations ont mené CDPQ-Infra à annoncer la mise sous terre d’une portion du tracé au centre-ville, qui déboucherait entre les rues De Bleury et Jeanne-Mance. Or, qu’en est-il de l’impact sur d’autres quartiers centraux, comme le Centre-Sud et le Faubourg Saint-Laurent, qui portent déjà les cicatrices laissées par d’autres grands projets de transport d’ampleur métropolitaine comme l’autoroute Ville-Marie ?

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

« Un tracé aérien peut avoir des conséquences importantes sur les quartiers touchés, qui se retrouvent scindés par une structure imposante », écrit l’auteure.

Au terme d’un long processus rassemblant au total plus de 1000 participations, le Programme particulier d’urbanisme (PPU) des Faubourgs⁠1 avait pourtant souligné l’importance d’un « décloisonnement » et de « l’ouverture sur le fleuve » du secteur, afin notamment de « corriger les grandes ruptures laissées par les opérations de rénovation urbaine et les aménagements autoroutiers des années 1950 à 1980 ». Or, non seulement ces quartiers seraient marqués par une structure aérienne d’envergure, mais la zone de transition, où le train passerait du souterrain au mode aérien, entraînerait inévitablement une barrière infranchissable d’une longueur pour l’instant difficile à estimer. Le tracé planifié ne prévoit pas non plus d’accès souterrain à la station Berri-UQAM, alors que des connexions structurantes seraient primordiales pour un projet de cette ampleur.

Une option réalisable

Afin d’éviter de répéter les erreurs du passé, il semble donc impératif d’évaluer la possibilité d’un tracé souterrain dans le Centre-Sud et le Faubourg Saint-Laurent avec une descente à l’est du pont Jacques-Cartier et du viaduc du Canadien Pacifique. Cette option a déjà fait l’objet de deux études de faisabilité, qui ont conclu qu’elle était réalisable malgré les risques potentiels⁠2.

Pour la poursuite des réflexions, des études devront être produites démontrant non pas les limites d’un tracé souterrain, mais bien les moyens pour y arriver, particulièrement dans certaines zones sensibles comme le Centre-Sud et le Faubourg Saint-Laurent.

Ces informations, communiquées de manière claire et concise, sont la clé d’un processus éclairé et complet à la hauteur du projet de société qu’est le REM de l’Est. Le commencement prochain des consultations du BAPE représente d’ailleurs l’occasion d’un large processus consultatif où pourrait être abordée l’entièreté des questions fondamentales entourant ce projet.

Le REM de l’Est est un projet innovant et fondamental qui marquera l’avenir de la métropole. Il convient maintenant de prendre les moyens nécessaires pour que cette marque ne soit pas celle d’une cicatrice lourde de regret pour les communautés locales, mais plutôt un levier pour la vitalité des quartiers impliqués.

1. Consultez le Programme particulier d’urbanisme (PPU) des Faubourgs de la Ville de Montréal 2. Consultez le Rapport d’étude d’alternatives en tunnel en centre-ville de Coentreprise AECOM-Systra 2. Consultez l’Analyse de faisabilité et de risques techniques liés aux variantes souterraines du REM de l’Est au centre-ville de Montréal, de Geocontrol

*Cosignataires : Marc-André Fortin, coordonnateur de la Table de concertation du Faubourg Saint-Laurent ; Ron Rayside, Rayside Labossière architecture et urbanisme

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