L’auteur s’adresse au ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge

Monsieur le Ministre, après 27 années d’enseignement, je considère avoir une assez bonne connaissance de ce qui est généralement nécessaire afin d’être crédible face à un groupe d’élèves : rigueur, cohérence… et la capacité à mettre occasionnellement la théorie de côté pour privilégier le concret.

C’est pourquoi je n’ai pas pu m’empêcher de sursauter en lisant l’article de Marie-Eve Morasseparu dans le numéro de La Presse du 26 janvier dernier où elle rapporte les statistiques que vous avez présentées sur Twitter concernant le taux d’absentéisme des élèves québécois lié à la COVID-19.

Lisez l’article de Marie-Eve Morasse

Selon vos chiffres, 2 % des élèves québécois seraient absents. Ces données sont tellement éloignées de la réalité que je me demande si vous avez souci de présenter un portrait réaliste et sérieux à la population qui est en droit de savoir ce qui se passe.

Depuis mon retour en classe le 18 janvier, je vois chaque jour des groupes dans lesquels il manque beaucoup plus que 2 % des élèves.

Plus tôt cette semaine, j’avais à mon horaire quatre groupes de mathématiques de secondaire 4. Voici ce que j’ai constaté :

  • première période : 22 % d’élèves absents
  • deuxième période : 13 % d’élèves absents
  • troisième période : 35 % d’élèves absents
  • quatrième période : 21 % d’élèves absents.

Comme vous pouvez le voir, nous sommes loin de 2 % d’absences. Sachez que je pourrais également vous donner plusieurs exemples fournis par mes collègues. Peu importe les matières et les niveaux, les jeunes ne sont pas en classe, pour des raisons liées à la COVID-19.

Vous allez me dire que c’est un échantillon bien petit puisqu’il s’agit d’une seule école.

Je dois toutefois spécifier que quelques appels à des collègues d’autres écoles et d’autres centres de services scolaires m’ont montré que la situation est semblable dans plusieurs établissements.

Évidemment, mon but n’est pas d’entrer dans une guerre de chiffres avec vous, car je sais très bien qu’à coup d’arguments administratifs et politiques vous pourrez justifier toutes les statistiques que vous détenez.

Toutefois, je crois que vous devez savoir qu’aux yeux de plusieurs enseignants, ainsi que de plusieurs parents qui discutent le soir avec leurs enfants, les chiffres que vous avancez ne font que vous faire perdre de la crédibilité, enlève du sérieux et de l’importance au réseau de l’éducation et alimente le cynisme de bon nombre d’enseignantes et enseignants.

En terminant, si vous souhaitez obtenir de vraies données, je suis certain que plusieurs enseignants seraient heureux de vous aider. Personnellement, je peux vous faire parvenir un état de mes groupes quotidiennement.

Le tout dans un souci de bienveillance.

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