Il y a quelques semaines, l’Autorité régionale du transport métropolitain (ARTM) présentait sa nouvelle grille tarifaire. Selon cette nouvelle grille, les aînés bénéficieront d’un rabais de 70 % sur les services de la Société de transport de Montréal (STM). Les enfants de 11 ans et moins voyageront gratuitement. Des décisions que la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a considérées comme une « première étape dans la bonne direction » concernant des « mesures de tarifications plus équitables. » De quelle équité parle-t-on ici ?

L’équité est généralement définie comme une démarche axée sur des principes de justice et d’impartialité. Assurer l’équité, c’est veiller à ce que toute personne ait accès aux ressources et aux occasions dont elle a besoin pour être en bonne santé. Pour arriver à plus d’équité, il faut bien cerner les écarts injustes en matière de conditions sociales et tenter d’y remédier. Est-ce vraiment à partir d’un critère d’âge qu’on peut y arriver ?

Actuellement, les iniquités en matière de transport sont nombreuses. Il y a d’abord le fait que tous et toutes paient le même prix, peu importe leur situation financière. Pour un individu avec un faible revenu, le transport collectif constitue bien souvent la seule option de transport. Le lien entre le fait de disposer d’un faible revenu et la dépendance au transport en commun est bien démontré. Toutefois, pour plusieurs personnes, cette option n’existe même pas.

Le coût d’une carte mensuelle permettant d’utiliser le réseau de transport en commun représente plus de 10 % des revenus d’une personne prestataire de l’aide sociale.

Proposer une réduction de tarif selon l’âge ne répond pas à cette situation. Au contraire, elle risque de créer plus d’iniquités, certaines personnes avec de bons revenus bénéficiant maintenant d’une réduction de tarif simplement en raison de leur âge.

Une autre iniquité existe en matière de transport : la façon dont sont assumés collectivement les coûts associés aux différents modes de transport. Lorsqu’il s’agit d’automobile, la grande majorité des coûts sont assumés par l’ensemble des Québécois, automobilistes ou non. On pense ici, notamment, aux coûts de construction et d’entretien des routes ainsi qu’à ceux associés à la congestion, pour ne citer que ces éléments.

En 2018, la congestion routière a coûté pas moins de 4,2 milliards de dollars à la communauté du Grand Montréal ! Selon une étude, pour chaque dollar dépensé par une personne pour se déplacer, la société paie en contrepartie 9,20 $ pour l’automobile, contre seulement 1,50 $ pour l’autobus. Or, les bienfaits du transport collectif ne sont plus à démontrer, que ce soit en matière de santé, d’environnement, d’inclusion sociale et de lutte contre les inégalités sociales. Les changements climatiques sont un enjeu déterminant de notre époque, et nous sommes à un moment décisif. Il faut agir.

Dans un souci d’équité avec les générations futures qui seront aux prises avec les dérèglements du climat, il nous apparaît assez clairement que l’utilisation du transport en commun en remplacement de la voiture individuelle constitue un élément clé de la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Et si on instaurait la gratuité du transport en commun ?

Quand vient le temps de décider d’emprunter sa voiture personnelle ou non pour ses déplacements quotidiens, le coût pèse lourd dans la balance. Ainsi, si l’on veut inciter les gens à utiliser davantage le transport en commun, l’avantage monétaire doit être significatif. D’ailleurs, partout où la gratuité des transports collectifs a été instaurée, on a vu une augmentation significative du nombre d’usagers, ce qui démontre bien que ça fonctionne.

Entendons-nous bien, nous ne remettons pas en question le fait que les enfants et les personnes âgées bénéficient d’un tarif réduit. Nous remettons simplement en question l’argument voulant qu’une tarification basée sur l’âge soit perçue comme plus équitable. Il est temps de cesser de mettre en place des politiques clientélistes et de commencer à réfléchir plus globalement aux problèmes de pauvreté, d’exclusion sociale et de changements climatiques.

Le transport représente un lieu de convergence important entre la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, et la défense de l’environnement. Le développement du transport collectif et de son accessibilité peut contribuer à améliorer la vie des personnes tout en aidant le Québec à relever les défis environnementaux.

Comme bien des gens, nous nous réjouissons de cette baisse de tarif pour ces deux groupes de personnes. Mais nous pensons qu’il faut aller plus loin qu’une simple réduction de tarifs basée sur l’âge pour répondre à la non-mobilité d’encore plus de citoyens. Pour ce faire, il est nécessaire d’instaurer la gratuité du transport en commun ou, au minimum, un tarif social basé sur le revenu. Plus qu’un coût, la gratuité du transport en commun est un investissement pour un monde plus juste et une planète plus en santé !

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