La lettre s’adresse au premier ministre du Québec, François Legault

Monsieur le Premier Ministre,
Nous avons pris connaissance du projet de loi 39 soumis à l’Assemblée nationale et dans lequel figurent des règles pour assurer la parité, et ce, de façon durable. Selon nous, qui avons travaillé à faire de l’égalité entre femmes et hommes du Québec une réalité, il va de soi que la parité en politique et dans toutes les instances de décision est l’aboutissement de ce travail.

Bien que le projet de loi 39 concerne la Réforme du mode de scrutin, des mesures pour établir la parité des candidatures y sont incluses, mais sont restées dans l’ombre. Or, si l’étude du projet est repoussée, comment justifier de laisser de côté cette avancée majeure ?

Nous vous demandons donc de considérer l’étude et l’adoption des mesures de parité dès maintenant, sans attendre.

Vous avez la chance de faire l’histoire d’ici les prochaines élections, en 2022, et nous comptons sur vous pour faire avancer la parité.

En effet, qui nous garantira que l’égalité de représentation sera au rendez-vous si on laisse au hasard la participation des femmes ?

Si personne ne se mobilise, si la pandémie maintient les femmes dans l’arrière-scène, comment nous assurer qu’elles seront présentes à égalité pour décider dans les instances politiques ?

À titre de titulaires de la condition féminine au gouvernement, nous avons constaté que les avancées, en termes de représentation politique pour les femmes, sont souvent suivies de reculs. Ce fut le cas en 2003, alors que nous venions de franchir 30 % de représentation de femmes à l’Assemblée nationale, et que le scrutin suivant ne comptait que 25 % de femmes élues. Le même phénomène s’est reproduit par la suite. Nous ne voulons plus reculer. Et pour cela, il faut que les candidatures soient suffisamment nombreuses afin de parvenir à une parité parmi les personnes élues.

Ce n’est qu’en inscrivant les mesures dans la loi, et en les rendant obligatoires que l’on assurera la parité. Et aujourd’hui, plus que jamais, la situation actuelle illustre à quel point les femmes sont au front pour assurer la survie, les soins à la famille et aux malades, l’éducation à leurs enfants, et tout ça en reculant sur le plan professionnel. Au chapitre de l’emploi, les femmes sont les grandes perdantes de la crise sanitaire. Nous qui avons vu à quel point il est ardu de faire prendre conscience des inégalités de sexe, pensons qu’il est primordial que les femmes soient élues et présentes dans les lieux de décision. C’est incontournable.

Plus de 100 pays dans le monde ont légiféré pour que les femmes soient à parité en politique avec leurs collègues masculins. Le Québec doit faire de même, lui qui a été capable de faire élire 42,4 % de députées aux dernières élections.

Qu’attendons-nous ?

Qui plus est, tous les partis sont favorable à la parité, tout comme la population qui la réclame à grands cris, et ce, dans toutes les sphères de décision. La politique, là où tout commence, devrait être un modèle.

En tant que premier ministre, vous avez affiché vos couleurs et visé l’objectif de parité dans votre parti et au Conseil des ministres.

Il n’en tient qu’à vous de faire le pas de plus pour que les femmes soient désormais partie prenante des instances politiques et ce durablement.

Si le projet de loi 39 est remis à plus tard, nous vous demandons de garantir que les articles qu’il contient sur la parité soient bonifiés et appliqués pour les prochaines élections.

C’est votre devoir de donner aux femmes la place qui leur revient.

* Cosignataires : les ex-ministres à la Condition féminine Pauline Marois (1981-1983 et 1985), Louise Harel (1996-1998), Linda Goupil (1998-2003), Michelle Courchesne (2003-2005), Christine St-Pierre (2007-2012), Agnès Maltais (2012-2014), Lise Thériault (2016-2017) et Hélène David (2017-2018). Les cosignataires donnent leur appui aux articles concernant la parité dans le projet de loi 39, cet appui ne peut être interprété comme un appui au projet de loi 39, Loi établissant un nouveau mode de scrutin.

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