Nous avons présidé au cours des dernières décennies le Conseil du statut de la femme. Chacune de nous a conseillé le gouvernement pour que l’égalité formelle entre les femmes et les hommes devienne égalité réelle. Nous avons pu observer que les grands principes d’égalité doivent être complétés par des lois et des mesures spécifiques et ciblées afin de cheminer vers cet objectif.

L’État québécois a fait de grands gestes historiques pour créer les conditions concrètes d’atteinte de l’égalité. À titre d’exemple, rappelons que le projet de loi 16 porté par Marie-Claire Kirkland-Casgrain qui visait l’égalité entre les époux en 1964 a été par la suite bonifié par plusieurs lois, dont la loi sur le patrimoine familial et le programme de perception des pensions alimentaires. Le principe d’un salaire égal pour un travail équivalent, inscrit dans la Charte québécoise des droits et des libertés, a dû être complété notamment par la Loi sur l’équité salariale puis par l’implantation des mesures sociales que sont le réseau de services de garde à l’enfance et l’assurance parentale. Ces gestes du législateur ont permis d’ancrer dans la réalité et de pérenniser les principes d’égalité qui ont été déterminants pour notre avancement collectif.

Il en va de même aujourd’hui en matière d’égalité de représentation politique au sein des institutions parlementaires : l’article de la loi électorale qui a accordé aux femmes le droit de vote et d’éligibilité en 1940 a été un grand pas pour la démocratie. Il a cependant été inopérant pour concrétiser le droit des femmes à l’égalité de représentation à l’Assemblée nationale. Celle-ci dépend essentiellement du bon vouloir des partis politiques de désigner des femmes candidates.

Le droit d’éligibilité doit être complété par des amendements à la loi électorale qui détermineront des mécanismes pour atteindre la parité de représentation entre les femmes et les hommes. C’est ce que vise une loi sur la parité.

L’Assemblée nationale du Québec a étudié au cours de la présente session le projet de loi 39 sur l’établissement d’un nouveau mode de scrutin. En fait, ce projet modifiant la loi électorale comprend aussi des dispositions incitant les partis politiques à présenter des candidatures paritaires aux élections générales. Ces articles ont grandement retenu l’attention lors de la commission parlementaire et, bien qu’ils constituent une avancée intéressante, ils doivent être renforcés, notamment au regard de l’obligation de résultat de la part des partis politiques.

Au moment de l’adoption en deuxième lecture, la ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Réforme électorale, Sonia LeBel, s’est d’ailleurs dite ouverte à les bonifier au cours des prochaines étapes du processus d’adoption. Plus précisément, elle a affirmé : « des améliorations [qui] pourraient permettre d’atteindre donc notre objectif, comme je le disais de proportionnalité, mais aussi d’offrir des institutions plus représentatives, plus démocratiques et plus accessibles » (Extrait du Journal des débats, 8 octobre 2020). Nous appuyons fortement les intentions de la ministre de légiférer dans ce sens et ainsi sortir du cercle vertueux des vœux pieux, pour l’atteinte de la parité pour les femmes en politique.

Les dispositions sur la parité peuvent être bonifiées et votées par l’Assemblée nationale indépendamment de la réforme du mode de scrutin et entrer en vigueur pour les prochaines élections générales de 2022. Un large consensus s’est établi dans la société québécoise et même chez les partis politiques sur la nécessité d’agir pour assurer une représentation équitable de la moitié féminine de la population au Parlement. Le gouvernement actuel peut dès maintenant, à son tour, marquer l’histoire et pérenniser dans des règles applicables à tous les partis politiques la parité à l’Assemblée nationale.

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