Des changements proposés par Ottawa retarderont l’accès à de nouveaux traitements pour des millions de citoyens

Les Canadiens et les gouvernements canadiens ont appris à leurs dépens, au cours de cette pandémie, à quel point il est pénible d’attendre pour l’accès à un nouveau traitement qui peut sauver des vies. Malheureusement, cette leçon, de nombreux patients la connaissent depuis fort longtemps.

Le gouvernement fédéral, nouvellement sensibilisé au problème de l’accès tardif aux nouveaux traitements (dans ce cas, un vaccin), a initié des efforts admirables pour diminuer l’attente des Canadiens.

Malheureusement, cette prise de conscience ne concerne que les vaccins relatifs aux pandémies, ce qui exclut les autres médicaments et traitements qui sont tout aussi importants pour des millions de Canadiens.

Alors que le gouvernement fédéral s’efforce d’obtenir l’engagement des sociétés pharmaceutiques à produire des vaccins ici, il poursuit en parallèle des réformes règlementaires et des politiques qui ralentiront l’accès à des traitements vitaux pour de nombreux patients du Québec et des autres provinces.

Les systèmes d’évaluation et de remboursement des médicaments sont déjà onéreux, redondants et inadéquats. Il faut parfois de deux à cinq ans pour que les patients accèdent à certains médicaments, et ce délai est encore plus long pour la médecine personnalisée et les maladies rares.

À l’heure actuelle, seuls 60 % des traitements, pour les maladies rares, se rendent jusqu’au Canada et la majorité de ceux-ci sont approuvés en moyenne six ans plus tard qu’en Europe ou aux États-Unis.

Or, les changements proposés par le gouvernement fédéral en matière de prix des nouveaux médicaments brevetés résulteront en une diminution du nombre d’essais cliniques partout au Canada et à des délais encore plus importants quant au remboursement de médicaments susceptibles de changer et de sauver la vie des patients.

Le gouvernement fédéral a rejeté les préoccupations des patients en insistant sur le fait que ces changements ne créeront pas d’obstacles à l’accès aux nouveaux médicaments. Malheureusement, les faits indiquent le contraire. Des Canadiens atteints de fibrose kystique sont décédés en attente d’un accès à un nouveau traitement qui aurait pu leur sauver la vie, mais qui n’est toujours pas disponible parce que le fabricant a retardé l’introduction du médicament au pays en raison des changements règlementaires proposés. De plus, d’autres patients vivants avec différentes maladies peinent à obtenir un accès à des traitements qui sont disponibles au sein d’autres juridictions à travers le monde.

En dépit d’affirmations contraires, le gouvernement fédéral sait pertinemment que les changements proposés retarderont l’accès aux nouveaux traitements.

C’est pourquoi il a exempté les vaccins et les traitements liés à la COVID-19 de son nouveau régime règlementaire. Ce faisant, il a implicitement reconnu que les changements proposés retarderont l’accès à de nouveaux médicaments pour des millions de Canadiens.

Au cours des prochains mois, tous les Canadiens qui souhaitent recevoir un vaccin pour se protéger contre la COVID-19 pourront le faire. Toutefois, nous ne devrions pas perdre de vue le fait que l’attente se poursuit pour des centaines de milliers de Canadiens, qui attendent d’avoir accès à de nouveaux traitements tout aussi importants que ce vaccin. Et contrairement à l’attente pour les vaccins, qui ne durera que quelques semaines ou quelques mois, ces patients auront possiblement à attendre plusieurs années de plus que nos voisins du Sud ou que nos confrères européens, et malheureusement, certains vont en mourir.

Les Canadiens méritent un accès rapide et équitable à tous les nouveaux traitements, pas uniquement à ceux qui sont destinés au traitement de la COVID-19. La vie de millions de Canadiens en dépend.

* Cosignataires : Tammy Moore, chef de la direction de la Société canadienne de la sclérose latérale amyotrophique (SLA Canada) ; Jackie Manthorne, présidente et chef de la direction du Réseau canadien des survivants du cancer ; Laurel Gillespie, chef de la direction de l’Association canadienne de soins palliatifs ; Eva Villalba, directrice générale de la Coalition Priorité cancer au Québec ; Barry Stein, président et chef de la direction de la Coalition Priorité cancer au Québec ; Doug Earle, président et chef de la direction de Cancer colorectal Canada ; Jida El Hajjar, vice-présidente, investissements et promotion de la santé, de la Fondation du cancer du sein du Québec ; Peter Glazier, vice-président exécutif de la Fondation Lung Health ; Kate Murray, présidente et chef de la direction de MitoCanada ; Elisabeth Baugh, chef de la direction de Cancer de l’ovaire Canada ; Laurent Proulx, président-directeur général de PROCURE – Halte au cancer de la prostate ; Indrek Koppel, chef, défense des droits et partenariats, de la Société de leucémie et lymphome du Canada (SLLC) ; Susi Vander Wyk, directrice générale de l’Association québécoise de l’hémoglobinurie paroxystique nocturne (HPN)

Qu'en pensez-vous? Exprimez votre opinion