Dans sa gestion de la pandémie, le Québec ressemble à un élève qui a trimé très dur, mais qui se retrouve quand même avec la pire note de la classe.

Du confinement généralisé du printemps dernier jusqu’au couvre-feu, qui empêche encore de mettre le nez dehors après 20 h, les Québécois en ont fait, des sacrifices, pour aplatir la fameuse courbe.

Malgré tout, un an après l’apparition de la COVID-19, le Québec affiche le nombre de cas le plus élevé de toutes les provinces canadiennes, proportionnellement à la population.

Pourquoi ce triste score ?

Il nous faut des explications. Il nous faut une enquête publique pour mettre le doigt sur le bobo.

La plus importante crise de l’histoire moderne du Québec mérite un véritable post mortem, par respect pour tous ceux qui ont souffert de la pandémie.

Pour les 10 372 victimes de la COVID-19, dont certaines sont mortes abandonnées à elles-mêmes, sans rien à boire, sans dire adieux à leurs proches.

Pour les travailleurs de la santé, qui ont le visage marqué par leur masque et le moral détruit par les heures supplémentaires et les décisions déchirantes.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

« La COVID-19 a soumis notre système de santé à un test de résistance suprême qui en a fait ressortir tous les points faibles », écrit Stéphanie Grammond.

Pour les jeunes dont le parcours scolaire a été chamboulé, les aînés qui souffrent d’isolement et tous les autres qui sont rongés par l’insomnie, l’anxiété et la détresse psychologique.

On leur doit bien ça.

On le doit aussi aux futures générations qui devront payer pendant des décennies la facture de la COVID-19. On ne veut pas qu’elles aient à revivre une telle crise parce qu’on n’aura pas eu le courage de tirer toutes les leçons de la crise actuelle. Il serait impardonnable de refaire deux fois les mêmes erreurs.

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Il est vrai que plusieurs enquêtes ont déjà été lancées par le Protecteur du citoyen, le coroner en chef du Québec, la commissaire à la santé, la police et même l’armée.

Ces processus moins lourds qu’une commission publique auront le mérite d’apporter des solutions plus rapides qui aideront à lutter contre la pandémie.

Or, toutes ces enquêtes se concentrent sur les résidences pour aînés, qui ont certainement été l’élément le plus révoltant de la crise. Sauf qu’il faut voir plus large. Il faut s’attaquer globalement à la gestion de la pandémie et aux problèmes chroniques du système de santé que la COVID-19 a fait ressortir.

Cet exercice mérite d’être fait en toute transparence et non pas à huis clos.

Pensez-y : les témoignages douteux et les étranges trous de mémoire des acteurs-clés qui se sont succédé à la commission Charbonneau sur l’industrie de la construction et à la commission Gomery sur le scandale des commandites ont eu bien plus de résonance dans la population qu’en a eu le rapport final.

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Mais l’idée, ici, n’est pas de se lancer dans une chasse aux sorcières pour trouver des coupables et les mener au bûcher. On ne veut surtout pas envoyer au banc des accusés les gens qui se sont démenés corps et âme pour gérer la crise.

La commission devrait être un outil pour améliorer les choses, pas un instrument pour donner des munitions à l’opposition, qui, il est vrai, ne sait plus à quel saint se vouer pour avoir un peu d’attention en ces temps de pandémie.

De toute façon, la population sait très bien que les problèmes qui seraient étalés en commission ne dépendent pas strictement de la Coalition avenir Québec (CAQ). C’est en partie ce qui explique que les sondages restent aussi favorables au premier ministre, François Legault.

Les gouvernements successifs n’ont jamais réussi à rétablir le système de santé, malgré leurs tentatives. D’ailleurs, une partie du blâme retomberait certainement sur les libéraux, en raison de la réforme de l’ancien ministre de la Santé Gaétan Barrette.

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La COVID-19 a soumis notre système de santé à un test de résistance suprême qui en a fait ressortir tous les points faibles.

Ne gaspillons pas cette « chance » de repartir sur des bases plus saines. Le retour à la normale ne suffit pas.

Avec le vieillissement de la population, le Québec doit se réinventer. Sinon, les dépenses en santé vont écraser le budget de la province et mettre à mal ses autres missions, comme l’éducation.

Il faut faire mieux.

En ce sens, une commission publique peut devenir un investissement, malgré ses coûts élevés (45 millions pour la commission Charbonneau). Il s’agit de bien définir son mandat pour limiter les redondances et éviter de s’égarer en cours de route.

Autrement, il serait possible d’élargir le mandat de la commissaire à la santé et de rendre ses travaux publics.

Même si la population est lasse d’entendre parler de la COVID-19, même si tout le monde aura hâte de passer à autre chose quand la tempête sera passée, ce serait une erreur de ne pas prendre le temps de faire un véritable bilan.

Si on n’apprend pas de la COVID-19, on n’apprendra jamais.

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